Les Colons de Catane : Marchander pour mieux se développerTest JDS

Les Colons de Catane : Marchander pour mieux se développer

Même si vous n’êtes pas pratiquant, vous avez bien du remarquer que ces dernières années on vous invitait de plus en plus souvent à des soirées dédiées aux jeux de société. L’engouement autour de ce loisir s’est naturellement traduit par une multiplication des titres. Parmi cette offre prolifique, on compte quelques monuments indépassables, des références indémodables qui ne se laissent pas enterrer par le flot de nouveautés. Les Colons de Catane sont justement de cette espèce là.

Le succès des Colons de Catane ne date pas d’hier. Tout droit issu du milieu des années 90, ce titre signé Klaus Teuber s’est rapidement imposé comme la figure de proue du jeu de société à l’allemande. Non seulement il a décroché quelques jolis prix dans son pays natal dont le très prestigieux Spiel des Jahres, mais il a aussi été très tôt traduit dans le monde entier. Loin d’être tombé dans l’oubli, il revient aujourd’hui encore régulièrement sur la table, notamment par le biais de ses extensions qui font évoluer en profondeur ses mécaniques. D’ailleurs, notez tout de suite que si le jeu de base est limité à quatre participants, une extension rapidement indispensable permet d’accueillir un ou deux joueurs de plus. Mais chaque chose en son temps, nous aurons d’autres occasions de nous attaquer à ces fameuses extensions, regardons pour l’instant de plus près ce qui fait la magie de la recette originale.

Une île aux mille visages

Le plateau est constitué d'un assemblage de tuiles hexagonales.

Le plateau est constitué d’un assemblage de tuiles hexagonales.

Comme son titre le laisse supposer, l’objectif dans les Colons de Catane est de prendre petit à petit possession d’une île en y développant des bourgades et des infrastructures. Le plateau de jeu a finalement assez peu de rapport avec la Sicile, si ce n’est que plusieurs puissances ont effectivement cherché à coloniser l’île italienne durant l’Antiquité. Concrètement, on se retrouve ici avec une aire de jeu mouvante constituée de tuiles hexagonales : les tuiles maritimes viennent encercler un assemblage de 19 tuiles terrains et, d’une partie à l’autre, la disposition de l’ensemble est amené à changer. Il existe principalement cinq types de terrain, chacun étant associé à une ressource bien précise : les forêts produisent du bois, les champs du blé… Il s’agit bien entendu là de matières premières essentielles aux joueurs pour construire des colonies, les faire évoluer en villes et relier le tout avec des routes. Afin de mettre la main sur ces précieuses ressources, il ne suffit pas d’installer un pied à terre à proximité de la tuile en question. En effet, chacune des tuiles se voit attribuer un nombre et ce sont les résultats des lancers de dés qui détermineront quels sont les terrains qui produiront des denrées au cours du tour en question. Finalement, c’est une forme de course à la construction que mènent les participants, chacun cherchant à s’installer sur les meilleures places, à atteindre en premier les emplacements qui semblent les plus prometteurs, coupant ainsi la route aux concurrents.

La loi du marché

Les ports permettent de réaliser des échanges dans de meilleures conditions.

Les ports permettent de réaliser des échanges dans de meilleures conditions.

Même en déployant des trésors d’ingéniosité, un même joueur ne peut pas être présent partout sur le terrain de jeu. L’extension territoriale est forcément freinée par celle des voisins et par son coût élevé en matières premières : il faut respecter une certaine distance entre les bourgades et chaque nouvelle colonie doit être reliée aux anciennes par un réseau de routes. Ajoutez à cela le facteur chance dans l’attribution des ressources et vous comprendrez sans mal qu’au cours d’une partie on se retrouve régulièrement à manquer d’une ou de plusieurs denrées. Il est toujours possible d’échanger les matières premières à quatre contre un ou à des taux un peu plus avantageux si vous avez construit sur un port, néanmoins la manœuvre reste coûteuse et on ne s’y essaye généralement qu’en dernier ressort. Cet effet de pénurie est plutôt là pour mettre en avant la mécanique de jeu principale des Colons : le troc entre les joueurs. Par exemple, vous avez un stock impressionnant de bois mais il vous faut des minerais, il se trouve justement qu’un autre participant vient d’en toucher. Au début de votre tour vous pourrez lui proposer d’échanger vos bûchettes contre ses cailloux, s’il s’agit d’un petit filou et que le marché est en sa faveur, il essaiera peut-être même de vous faire cracher plus d’une carte en échange de son précieux rocher… C’est là que le jeu prend toute sa saveur, c’est dans ces moments de négociation que se crée une ambiance conviviale et que les participants peuvent laisser libre cours à leur verve.

Un développement en bonne entente

Le voleur bloque totalement la production de ressource sur la tuile où il se situe.

Le voleur bloque totalement la production de ressource sur la tuile où il se situe.

Ne prenez pas à la légère ces phases de marchandage, pour gagner à Catane il est finalement préférable d’être un camelot roublard qu’un gestionnaire pointilleux. D’ailleurs, même s’il est possible de nuire directement à ses adversaires, il faut toujours le faire avec tact et parcimonie si on ne veut pas être mis sur la touche. On peut tout à fait acheter des cartes développement dotées de quelques effets un peu vicelards comme la possibilité de s’accaparer toutes les ressources d’un type précis présentes dans la main des autres joueurs. Le coup bas le plus courant est un peu moins violent : à chaque fois qu’une personne fait sept aux dés, elle peut déplacer le voleur sur la tuile de son choix, bloquant ainsi la production de ressource de cette dernière, tout en profitant de l’occasion pour tirer au sort une carte chez le joueur qu’elle bloque. Bref, tout n’est pas rose entre les participants, et pourtant l’agressivité pure et dure mène rarement à la victoire. C’est bien simple, pour amasser un maximum de points, il faut parvenir à développer ses colonies, ce qui implique d’avoir suffisamment de ressources et donc de faire du commerce avec les autres joueurs. Il va de soi qu’un participant à qui vous avez constamment mis des bâtons dans les roues ne sera pas forcément disposé à vous troquer ses denrées… Les Colons de Catane a beau être un jeu compétitif, ce ne sont pas des oppositions franches qui viennent structurer les partie, généralement tous les participants ont intérêt à travailler un minimum de concert pour progresser collectivement, à part bien entendu lorsque l’on s’approche de la fin de la partie et que l’un des joueurs atteint presque l’objectif de points.

Les Colons de Catane repose finalement sur une recette simple et conviviale, et c’est peut-être là la clef de son succès. En effet, il ne s’agit jamais de s’acharner sur les autres joueurs dans le but de les écraser, mais plutôt d’alimenter une synergie entre les participants tout en essayant de tirer profit individuellement de la situation. Voilà toute la beauté du Catane : l’esprit de compétition ne vient pas entamer la bonne humeur autour de la table, ce n’est généralement pas l’agressivité qui est récompensée, mais bien plutôt la capacité de s’attirer la confiance des autres. En un mot, c’est un jeu autour duquel on scelle davantage les amitiés qu’on ne les brise.

L'avis d'extralife
  1. Auteur : Klaus Teuber
  2. Éditeur : Filosofia
  3. Genre : Gestion, marchandage
  4. Date de sortie : 1995
  5. Nombre de joueurs : 3 à 4 joueurs, 5 à 6 avec l'extension
  6. Âge recommandé : A partir de 10 ans

L'avis d'Alexis

  • colons_de_catane_001Catane s'est imposé à raison comme une véritable référence du genre. Ses mécaniques de jeu simples le rendent particulièrement accessible. Si certains regrettent que la chance prennent souvent une place centrale dans les parties, il faut tout de même reconnaître que cet aspect aléatoire incite aussi les participants à interagir les uns avec les autres.
5
  • L'avis de Jean-Marc
  • L'avis de Nicolas G.
miniblob

Tombé sur Terre un peu par hasard, le blob dévore mollement tout ce qu'il trouve dans l'espoir de comprendre son environnement. Ne jugez pas trop sévèrement son appétit vorace ou vous risquez d'être au menu de son prochain repas.

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8 commentaires

  1. petruschka
    petruschka
    4 septembre 2015 à 18 h 35 min

    Merci pour cet article ! Je ne compte plus les heures passées à jouer à ce jeu … ;)

  2. PaulBismuth
    PaulBismuth
    6 septembre 2015 à 0 h 48 min

    Un excellent jeu de société qu’il fait toujours bon sortir de temps en temps !
    Les extensions ajoutent vraiment un plus, et la version jeu de cartes à deux joueurs n’est pas non plus dénuée d’intérêt !

  3. Robbabouk
    Robbabouk
    10 septembre 2015 à 3 h 25 min

    Je l’ai découvert il y a peu mais par l’édition de chez Asmodee. Je te conseille de jeter un oeil car même si le jeu est identique, déjà le plateau et les jetons n’ont juste rien à voir, mais ils ont également fait plusieurs déclinaisons “Villes et Chevaliers”, “Pirates et Découvreurs”, “Barbares et marchands”, “marins”, ainsi qu’un catane junior. Je ne sais pas trop ce que ça vaut et il n’y a pas trop d’infos dessus, ça m’intéresserait perso d’en savoir plus :)

    PS : Jihem qui n’aime pas trop Catane?! Trop joué/perdu? :)

  4. Jose_Starr
    Jose_Starr
    19 septembre 2015 à 9 h 13 min

    Merci pour cet article !
    Je pensais acheter la version spécifique pour 2 joueurs, est-ce qu’elle est du même niveau que le jeu de base pour 3 à 4 joueurs ?

  5. Nostromo
    Nostromo
    2 octobre 2015 à 13 h 51 min

    J’ai hésité à le prendre et j’ai finalement craquer pour 7 Wonder que je ne regrette pas, mais le test donne envi.. 0_0

  6. SilverArchon
    SilverArchon
    12 novembre 2015 à 14 h 22 min

    5/5 vraiment ? En 2015 ? Les mécaniques de jdp ont tellement évoluées en 20 ans ! Et le secteur du jeu de développement est bourrés d’excellents jeux (Caylus, les jeux d’Uwe Rosenberg, Tzolkin, Terra Mystica…), pourquoi continuer de jouer à Catane passé 12 ans ?

  7. konseledise
    konseledise
    2 décembre 2015 à 10 h 24 min

    Je n’ai pas trop aimé la version à 2 joueurs, qui m’a semblé extrêmement longue (bon je jouais avec mon fils de 7 ans et demi, ça n’aide pas, mais près de 3 heures quand même !!!).

    Elle a ses fans néanmoins.

  8. konseledise
    konseledise
    2 décembre 2015 à 10 h 27 min

    SilverArchon, je te trouve dur. Catane reste un excellent jeu.

    Le bémol, pour moi, ce sont les règles touffus. Je connais des gens qui se sont vus offrir ce jeu mais n’ont jamais rien compris. Quand on te l’explique, c’est beaucoup plus fluide bien sûr.

    Je dirais que Catane serait plus simple d’accès si sa complexité était légèrement inférieure. Bien sûr ça ne serait plus Catane.

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