Caverna : Cave vs Cave – Bien ta grotte ?Test JDS

Caverna : Cave vs Cave – Bien ta grotte ?

L’auteur Uwe Rosenberg est principalement connu pour ses grosses boîtes bien velues débordant de matériel — des usines à gaz où les joueurs passent le plus clair de leur temps à mettre sur pieds de véritables chaines de transformations capables de faire fructifier les quelques ressources de départ. C’est notamment le cas d’Agricola, Le Havre ou encore de Caverna, trois jeux qui ne sont pas pris au hasard dans le catalogue de Rosenberg puisqu’ils font tous les trois l’objet de déclinaisons spécialement pensées pour se pratiquer à deux. Si Agricola : Terres d’Élevage et Le Havre : Le Port Fluvial ont déjà séduit et trouvé leur public depuis des années, c’est désormais au tour de Caverna : Caverne contre Caverne d’être passé au crible.

Si vous êtes déjà joueurs d’Agricola, Le Havre ou de Caverna, vous savez que ces trois jeux peuvent déjà se savourer à deux dès le départ sans avoir à racheter d’autres versions. Dès lors, quand Rosenberg imagine de nouvelles éditions estampillées deux joueurs, il ne s’agit pas de simple réductions ou variantes du jeu de base, mais bel et bien de tous nouveaux jeux basés sur le même univers, mais pas forcément sur les mêmes mécanismes. Si cela peut vous aider à mieux cerner le concept, le récent 7 Wonders Duel illustre parfaitement cette volonté de repenser un jeu pour l’adapter à deux joueurs seulement, sans forcément dénaturer ses intentions premières.

La partie débute toujours avec les mêmes six salles, au milieu entre les joueurs.

Dans le cas de Caverna : Caverne contre Caverne, un gros coup de balai a envoyé valdinguer pas mal d’éléments de la boîte de base pour finalement se concentrer sur ce qui fait la particularité du jeu et qui lui donne même son titre : l’aménagement de la caverne. Dans Caverne contre Caverne, on se retrouve dans une sorte de concours opposant deux groupes de nains. L’enjeu est simple : bâtir une meilleure grotte que celle de son voisin. Et par meilleure, il faut comprendre une grotte dont les salles parviennent à se montrer les plus efficaces possible pour produire de nouvelles ressources, nécessaires pour créer encore d’autres salles et ainsi de suite.

On est ici dans du pur jeu de placement d’ouvriers, qui se pratique toutefois sans aucun ouvrier. Au lieu de poser un pion sur une action, le joueur actif glisse simplement l’une des tuiles de son côté du plateau central, signifiant qu’il entreprend cette action, et qu’il en prive son adversaire durant ce round. En alternance, les joueurs effectuent autant d’actions que le permet la manche en cours, puis les tuiles sont réinitialisées, une nouvelle action est révélée et le round suivant démarre. Ce petit manège dure pendant 8 manches, après quoi chacun additionne la quantité d’or qui lui reste entre les mains aux points de victoire donnés par toutes les salles dans sa grotte. Le nain avec le plus de points remporte la partie.

La piste d’actions. Pas besoin d’ouvriers pour sélectionner les tuiles.

Parmi les actions disponibles, on trouve évidemment de quoi gonfler ses stocks de bois, de pierre, de blé ou même d’amidonnier. Oui… Rosenberg a une véritable passion pour les ressources atypiques, et après le lin dans Terres d’Arle, l’auteur place l’amidonnier. Ce n’était pas vraiment nécessaire, l’amidonnier est peut-être même la ressource de trop dans Caverne contre Caverne, mais sa présence nous aura au moins appris son existence. On ressort donc du jeu un peu moins bête. Bref, retour aux actions qui proposent aussi de transformer les ressources pour obtenir de l’or ou de la nourriture par exemple, ou même d’aménager sa caverne. Ainsi, certaines tuiles permettent de creuser pour libérer de nouveaux espaces dans la grotte, qui ne demanderont qu’à être meublés en utilisant encore un autre type d’action. Enfin, il y a les actions destinées à activer une ou plusieurs salles déjà construites, véritables clé de voûte du jeu, puisque ce sont les pouvoirs de ces salles qui distinguent réellement la grotte d’un joueur de celle de son adversaire. La stratégie adoptée dictera donc (en partie) les salles à construire, et inversement.

Aménager une pièce résulte d’une longue préparation en amont. Il faut bien sûr avoir une place libre dans sa grotte et les ressources nécessaires dans ses réserves, mais pas que. Véritables adeptes du feng shui, les nains de Caverna : Caverne contre Caverne exigent que la configuration murale soit conforme à la future salle. Pour cela, les joueurs devront au préalable diviser leurs grottes en érigeant des murs selon les prérequis des pièces convoitées. Et vous l’avez deviné, la construction de murs passe là encore par une autre action à entreprendre en plus de tout le reste.

La quantité de ressources est indiqué sur le plateau personnel.

Je vous l’accorde, jusque là, pas de quoi s’enthousiasmer outre mesure, on reste dans du grand classique — et même du classique presque décevant pour du Rosenberg. Mais Caverna : Caverne contre Caverne ne s’arrête pas tout à fait là. Grâce à sa mise en place semi aléatoire, les parties ne prennent pas toujours la même direction et empruntent même une voie plus ou moins agressive selon les cas. Concrètement, si les tuiles d’actions communes apparaîtront à peu de choses près toujours dans le même ordre (c’était déjà le cas des cartes dans le jeu de base, en fait), les salles disponibles sortiront quant à elles toujours au hasard. Il se trouve que ces salles sont imprimées au recto des tuiles qui recouvrent en début de partie l’ensemble des deux grottes. Lorsqu’un joueur entreprend une excavation, il retourne alors l’une de ces tuiles, la place dans la réserve commune et la salle devient instantanément disponible à la construction pour les deux joueurs. Cela signifie donc plusieurs choses. D’abord, un joueur peut tout à fait construire une salle dont la tuile provient du plateau adverse. Ensuite, puisque tout est placé au hasard, l’ordre d’arrivée des salles est toujours différent, renouvelant forcément le petit casse-tête qui consiste à trouver les meilleures combinaisons de salles possible. Un petit regret toutefois, les six salles disponibles en début restent pour leur part toujours les mêmes. Un peu de variété à ce niveau aurait été fort appréciable. À vrai dire, l’ajout de nouvelles salles au travers de futures extensions semble même indispensable pour donner un peu d’endurance à la boîte qui finira tôt ou tard par tourner en rond.

Les rares salles bleues offrent des pouvoirs passifs.

Comme dit plus haut, le jeu peut se montrer plus ou moins agressif. Cela dépend en réalité de votre approche, mais disons que les situations ne manquent pas où un joueur se sent presque obligé de construire une salle dans l’unique but de ne pas la voir atterrir dans la grotte adverse. Même si une pièce ne colle pas forcément à sa stratégie globale, mieux vaut parfois agir préventivement et priver son rival d’un élément trop dangereux. Évidemment, rien ne nous empêche de profiter du jeu plus pacifiquement, en cherchant simplement à se débrouiller au mieux avec ce que l’on a, sans couper l’herbe sous le pied du voisin, et cela même si on sent bien que l’auteur a volontairement choisi de privilégier la confrontation directe. Après tout, son jeu s’appelle bien Caverne contre Caverne. Un moyen existe pourtant d’éviter le conflit  : jouer seul. Comme la plupart des jeux de Rosenberg, un mode solo répond présent et constitue même une avenue tout à fait légitime pour profiter de ce nouveau Caverna. Tout seul, le jeu prend une dimension casse-tête encore plus prononcée, puisque l’apparition des salles se trouve encore plus aléatoire et perturbée qu’à deux joueurs : certaines n’apparaîtront même pas durant toute la partie. Il faudra alors sérieusement réfléchir aux alternatives possibles pour marquer le plus de points. En réalité, même si j’aime Caverna : Caverne contre Caverne à deux joueurs en dépit de son côté agressif, c’est tout seul que je préfère me lancer dans la décoration caverneuse, en essayant de tirer profit de ce que le hasard me donne à chaque nouvelle partie.

  1. Auteur : Uwe Rosenberg
  2. Illustrateur : Klemens Franz
  3. Éditeur : Funforge
  4. Genre : Placement d'ouvriers
  5. Nombre de joueurs : 1 ou 2 joueurs
  6. Âge recommandé : 12 ans et plus
  7. Durée de la partie : 20 en solo, 40 min à 2 joueurs
  8. Date de sortie : Mai 2018 en français
  • Bien que différent du Caverna classique, Caverna : Caverne contre Caverne conserve d'une certaine manière l'ADN du jeu de base en plaçant la grotte et ses multiples salles spéciales au cœur du gameplay. Il n'est donc plus question d'aller jardiner ou de nourrir sa petite famille, mais de concentrer ses décisions sur la façon d'aménager sa caverne pour empocher le plus de points possible. Très conflictuelle à deux joueurs, la petite boîte adopte un format forcément plus posé en solo. Dans les deux cas, il est question de faire au mieux avec ce que le hasard distribue, et dans les deux cas aussi, on aimerait voir arriver de nouvelles tuiles pour éviter au jeu de tomber dans une certaine routine.
3
Jihem

La découverte de BurgerTime aux débuts des années 80 aura clairement affecté la vie de ce grand bonhomme. Non seulement, Jihem a développé une passion pour les jeux vidéo, mais il a également choisi de s'installer au pays du hamburger. Sa mère est plutôt heureuse qu'il n'ait pas découvert les jeux avec Boogerman.

Soutenez ExtraLife

A voir aussi

Réponse