Odin Sphere Leifthrasir : Le meilleur de Vanillaware Test JV

Odin Sphere Leifthrasir : Le meilleur de Vanillaware

En toute discrétion, à une époque où le nom de Vanillaware n’évoquait encore rien aux joueurs, un titre poétique auréolé d’une 2D enchanteresse laissa sur PS2 un souvenir impérissable à tous ceux qui eurent la curiosité de l’approcher. Quasiment une décennie plus tard, le studio magicien nous en livre une copie revue et corrigée, proche de la perfection.

Résolument en marge de tout ce que l’on pouvait trouver en 2007 sur PS2, Odin Sphere demeure encore aujourd’hui l’un des plus grands chefs-d’œuvre de Vanillaware. Plus encore qu’un Muramasa ou qu’un Dragon’s Crown, cet action-RPG dégage en effet une poésie et un attrait qui fascinent et enflamment l’imagination. Car au travers des récits de ses personnages aux destins croisés, Odin Sphere se place comme l’héritier de ces contes d’autrefois que l’on pouvait lire dans des ouvrages souvent richement illustrés relatant les exploits épiques de chevaliers pourfendeurs de dragons. Déjà fantastique lors de sa sortie originale, le titre n’était finalement entaché que par la présence de lourds ralentissements lors des combats les plus chargés, trahissant l’ambition prématurée d’un développeur qui, aujourd’hui, peut enfin s’appuyer sur une technologie solide pour nous présenter un Odin Sphere Leifthrasir plus étincelant que jamais.

Car dans sa version 2016, Odin Sphere Leifthrasir ne nous fait pas la seule bonne surprise d’une prestation sans tache mais s’enrichit surtout d’agréments inédits qui le rendent définitivement incontournable. Pour mieux comprendre la pertinence de ces ajouts, il faut garder à l’esprit que le concept de ce titre a cela de bien particulier qu’il relève autant du RPG que du jeu d’action. À la limite du beat’em up, les phases de combats en scrolling horizontal se déroulent sur des sortes de sphères donnant l’impression d’évoluer sur des mini planètes reliées entre elles par des issues formant autant de labyrinthes que de zones à thèmes. La forêt luxuriante, le champ de bataille désertique ou la montagne truffée de congères sont un émerveillement de chaque instant devant le talent des graphistes de Vanillaware, véritables orfèvres en matière de technique 2D. Débarrassés de leurs ralentissements de l’époque, les affrontements étincellent d’autant plus ostensiblement que les joueurs n’ont plus aucune raison de se retenir de s’improviser maîtres artificiers en balançant une quantité astronomiques de potions magiques de toutes sortes à la face de leurs adversaires. Toujours aussi imposants, les boss sont bien souvent noyés dans un incroyable déluge d’effets visuels traduisant l’explosion d’une potion toxique, d’un immense jet de flammes ou d’un cyclone balayant tout sur son passage. Mais le plus jouissif pour le joueur ayant connu la version originale (incluse par ailleurs dans ce remake) est de constater à quel point les concepteurs ont su s’inspirer de leurs autres créations afin d’améliorer le gameplay d’Odin Sphere, empruntant notamment beaucoup à Muramasa pour rendre les batailles nerveuses à souhait.

Non content de nous offrir un système de combat entièrement retravaillé, Odin Sphere Leifthrasir prend aussi la peine d’inclure une toute nouvelle arborescence de techniques spéciales évolutives permettant de personnaliser les actions de nos personnages au fil de la partie. Contenues dans des prismes à phozons parfois bien cachés, ces compétences sont propres à chacun des héros et recèlent parfois des indices concernant la manière de dénicher telle ou telle skill facultative. Sans aller aussi loin que les secrets relatifs aux quêtes d’un Dragon’s Crown, la manière de mettre la main sur certaines de ces capacités se révèle ainsi parfois très subtile et on peut facilement passer à côté lors d’un premier run. Car les maps des différentes régions ont paradoxalement le défaut de se parcourir de manière assez linéaire, les marchands ayant toujours une carte globale des environnements à nous proposer à des prix souvent dérisoires. Et même si ces maps ne dévoilent pas les salles secrètes contenant les fameux prismes cachés, elles incitent à une traversée rapide des environnements, axée avant tout sur un nettoyage rapide des zones de combat visant à débloquer les meilleures récompenses de fin de bataille. Pourtant, même en rushant, Odin Sphere Leifthrasir n’est pas de ces softs que l’on peut boucler en moins d’une trentaine d’heures, surtout si l’on vise le fin mot de l’histoire.

Déstabilisant, le déroulement du jeu l’est d’autant plus que, sans aller jusqu’à l’excès d’un Valkyrie Profile, il prend le temps de soigner ses séquences narratives au moyen de cut-scenes relativement longues qui donnent au scénario des allures de pièce de théâtre. S’articulant autour de cinq personnages jouables amenés à se croiser au fil de la partie, et bien souvent à s’affronter, l’histoire est d’une richesse fascinante et offre deux niveaux de lectures selon que l’on découvre les scènes dans l’ordre proposé par le jeu ou de façon chronologique via les archives. On s’aperçoit en effet que chaque nouveau conte met en lumière certains éléments clefs dont on ne peut pas saisir toute la portée la première fois que ces événements interviennent dans le scénario. Plus que jamais, la question des points de vue reste donc au cœur de ce titre qui nous offre autant de regards distincts sur l’histoire que de protagonistes jouables. Rien que pour l’originalité de sa narration, Odin Sphere Leifthrasir mérite déjà que l’on s’y attarde, d’autant qu’il peut compter sur une traduction française impeccable servie par les doublages japonais originaux.

Mais il y a en réalité autant de façons d’apprécier Odin Sphere Leifthrasir que de manières d’aborder la découverte du jeu. Si la plupart des joueurs seront avant tout marqués par la dimension enchanteresse de la réalisation typique des contes de fées, par l’histoire tragique des personnages intervenant dans le récit ou par la frénésie des scènes de combat, d’autres retiendront en premier lieu la magie qui se dégage de certaines subtilités relatives au gameplay. Par exemple, le fait de devoir planter des graines à même le sol pour faire pousser des arbustes pouvant donner toutes sortes de fruits (et même des arbres à moutons produisant de succulents gigots !) nous rappelle à quel point les créateurs de Vanillaware sont de fins gourmets. Car les terres d’Erion sont propices à la culture de plantes qui germent instantanément moyennant une libération de phozons suffisants. À l’instar de la quasi totalité de leurs productions, Odin Sphere Leifthrasir fait ainsi intervenir la nourriture comme principale source d’évolution, le fait de manger étant le meilleur moyen de faire gagner des niveaux à ses personnages. Plus étonnant encore, c’est en cuisinant la viande, les fruits et autres matières premières que l’on gagne le plus d’expérience, le jeu abritant de véritables restaurants dans lesquels il est possible de se faire cuisiner des plats de choix pour booster ses héros en quelques minutes ! La gestion de la nourriture est si poussée qu’on trouve carrément des plats à emporter et des denrées périssables qui ont leur utilité. On peut même placer un œuf par terre pour élever un poussin qui, en gobant des graines, deviendra un poulet produisant ensuite d’autres œufs…

Extrêmement bien conçu, le système de jeu est une source perpétuelle d’étonnement qui nous fait vite oublier le côté relativement redondant des joutes éclair dont la brièveté pourra surprendre les joueurs en demande d’action. Pour autant, la confrontation avec les boss dans les niveaux de difficulté les plus élevés constitue un challenge à ne pas sous-estimer, obligeant à une parfaite maîtrise de tous les aspects du gameplay pour ne pas se laisser dépasser par une adversité franchement impressionnante. Tout aussi approfondie que la cuisine, l’alchimie consistant à mixer toutes sortes d’objets (et même les restes de nourritures tels les grappes de raisins ou les os de gigots) pour produire des potions magiques offensives ou défensives, est un élément sur lequel on pourrait passer des heures tant il faut tâtonner pour trouver les bonnes combinaisons. Aussi nombreuses que les lettres de l’alphabet, ces potions sont en effet le meilleur moyen de personnaliser sa façon de jouer en prévision d’âpres combats durant lesquels un puissant explosif ou un empoisonnement peuvent faire toute la différence. Les environnements renferment d’ailleurs tous un grand nombre de mandragores cachées dans le sol qui ne se signalent que par un bruit discret que l’on apprend vite à distinguer pour chasser ces pauvres créatures qui constituent le matériau de base du parfait alchimiste.

Finalement, toutes ces lignes noircies ne nous ont jusque-là permis que de survoler les mille et une trouvailles que recèle cet Odin Sphere Leifthrasir et sur lequel il y aurait tant à dire. Mais n’est-ce pas lorsqu’on en sait le moins que l’on apprécie le plus les créations les plus originales ? Nous conclurons donc ce test par une vidéo de notre cru qui, nous l’espérons, constituera une ouverture sympathique au background si fascinant de ce conte vidéoludique dont l’une des principales particularités est d’offrir une multiplicité de points de vue qui s’entrecroisent autour d’une seule et même histoire.

L'avis d'extralife
  1. Développeur : Vanillaware
  2. Editeur : NIS America
  3. Genre : Action-RPG
  4. Supports : PS4, PS Vita, PS3
  5. Date de sortie : 24 juin 2016
  6. Âge recommandé : 12 ans et plus
  • odin_sphere_leifthrasir_jaquetteSi l'on vient généralement à Odin Sphere Leifthrasir pour sa direction artistique qui s'inscrit résolument dans l'esprit des contes de fées, on en ressort souvent subjugué par la pertinence et l'originalité des multiples trouvailles qu'il renferme. Les responsables de ce remake sont en effet parvenus à insuffler au titre initial tout ce qui lui manquait pour donner au joueur l'envie de s'incliner devant le talent de l'équipe de Vanillaware. Qu'il soit question de la réalisation, du scénario ou de l'action pure, Odin Sphere Leifthrasir impressionne, tout simplement. Sans aucun doute le titre le plus admirable et le plus symbolique du studio !

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1 commentaire

  1. Ponsrem
    Ponsrem
    26 août 2016 à 23 h 06 min

    Une petite perle découvert lors de sa sortie sur PS2, et qui est magnifié dans cette version. Super test !

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