Yooka-Laylee : C’était quand même mieux avant Test JV

Yooka-Laylee : C’était quand même mieux avant

Les intentions du studio Playtonic étaient claires dès le départ. Composée essentiellement d’anciens de Rare, la team s’est mis en tête de réaliser un titre à l’ancienne, comme au bon vieux temps jadis des premières aventures de Banjo-Kazooie. Dans la mesure où les jeux de plates-formes de cette trempe ont quasiment tous disparus, l’idée d’en découvrir un tout nouveau, réalisé par les grands maîtres du genre qui plus est, a de quoi donner la banane. Jusqu’à ce qu’on se souvienne que la nostalgie, c’est comme le vin. L’amour et la passion ne suffisent pas à produire un grand cru.

Comme bien souvent, c’est dans les tuyaux de Kickstarter qu’a grossi le projet Yooka-Laylee. Avec une cagnotte avoisinant les 2,5 millions d’euros, Playtonic s’est fait plaisir en imaginant un titre capable de prendre le relais spirituel de la série Banjo-Kazooie. La formule est même reprise à la virgule près pour mettre en scène un couple de personnages haut en couleurs dans un jeu de plates-formes où tout le monde a des gros yeux cartoon et s’exprime en onomatopées rigolotes. Les similitudes sont trop nombreuses pour être toutes listées, mais pour planter rapidement le décor, sachez que Yooka le caméléon reprend le rôle de l’ours Banjo. Plutôt calme et posé, le reptile trimballe sur ses épaules la chauve-souris Laylee, dont les répliques acerbes et sarcastiques n’ont rien à envier à celles de Kazooie. Ensemble, les deux compères devront traverser cinq mondes thématiques (îles tropicales, montagnes glacées, marais sombres, casino et galaxie) ainsi qu’un hub central et une zone de départ, pour retrouver des pages de livres volées par le grand vilain de l’histoire. Le tout se déroule dans une ambiance très bon enfant, constamment soutenue par des musiques entraînantes dont les mélodies renvoient, elles aussi, aux partitions de Banjo-Kazooie.

Il ne faut pas plus de quelques secondes pour retrouver des sensations de jeu que l’on pensait perdues à jamais. Double sauts, roulades, des centaines de collectibles à dénicher aux moindres mouvements de caméra, tout semble réuni pour faire le bonheur des joueurs. Rapidement, les héros débloquent de nouveaux mouvements pour ramasser encore plus de pages et accéder à de nouvelles zones. C’est d’ailleurs là l’une des petites trouvailles du titre, les joueurs peuvent choisir de dépenser quelques pages pour débloquer le prochain monde ou agrandir un niveau déjà exploré et révéler de toutes nouvelles sections, où les attendent de nouvelles pages. Chaque monde regorge ainsi de secrets, de petites épreuves à franchir et de passages à explorer. Courses de vitesse, chasses aux fantômes, mini-jeux d’arcade, parcours sur un chariot de mine, et bien plus encore, les développeurs ne misent pas forcément sur l’originalité, mais injectent autant de contenu que possible pour perdre les joueurs dans un tourbillon de choses à faire. Sur ce plan-là, c’est au top. D’autant que Playtonic assume pleinement son degré d’originalité zéro et sa collection de vieilles ficelles qui faisaient le charme des anciens titres. Le studio souligne d’ailleurs ses intentions par une pléthore de remarques sur tel ou tel aspect qui ne se fait plus dans les jeux vidéo d’aujourd’hui. Ces interventions prêtent généralement à sourire en dépit de leur côté un peu lourdingue et trop appuyé.

Mais, et c’est un gros mais, tout est loin d’être parfait dans Yooka-Laylee. Comme dit en intro, jouer la carte de la nostalgie n’est jamais suffisant. Bien au contraire, il est crucial qu’un développeur parvienne à prendre le recul nécessaire pour ne pas s’embourber dans un cahier des charges passéiste et intolérant au moindre confort de jeu apparu au cours des deux dernières décennies. Et il semble bien que Playtonic n’ait pas trouvé l’équilibre souhaité. Cela passe par tout un tas de petits détails qui, mis bout à bout, nuisent fortement au plaisir de jeu. On pense notamment au fait que les items à ramasser sont dénués du moindre magnétisme obligeant donc le héros à passer précisément sur le centre d’un objet pour le choper – ce qui devient vite pénible quand il faut naviguer au millimètre près dans le feu de l’action et que la caméra décide qu’il est bien plus intéressant de se braquer sur un mur plutôt que sur la plate-forme visée. La caméra, parlons-en justement. Comment se fait-il qu’on se retrouve en 2017 à devoir une nouvelle fois batailler pour obtenir un champ de vision relativement décent ? Même en zone dégagée, l’appréciation des distances se montre délicate, et rien n’est fait pour permettre de corriger cela. Une simple option pour rapprocher ou éloigner la caméra aurait suffi à rectifier le tir. Mais non, ce type d’option n’était visiblement pas assez old school pour Yooka-Laylee.

D’autres éléments viennent aussi gâcher le plaisir, comme cette idée absolument ridicule d’inclure un quizz sorti de nulle part. Et il ne s’agit pas d’un faux quizz avec des questions bidons pour faire rigoler, mais d’une vraie interro surprise pour vérifier que le joueur a bien été attentif. On lui demandera par exemple la couleur du premier fantôme capturé, le nom du tout premier ennemi tué dans tel ou tel monde (au passage, je n’ai pas vu le moindre nom d’ennemi indiqué durant le jeu…) ou le nombre d’items obtenus à tel endroit. Pas amusants une seule seconde et réellement pénibles puisque les questions sont aléatoires et que les mauvaises réponses obligent le joueur à recommencer la séquence depuis de début, les quizz symbolisent parfaitement les plus gros problèmes de Yooka-Laylee.

Plusieurs fois pendant le jeu, on en vient à se demander ce qui a bien pu passer par la tête des développeurs pour produire de telles fautes de goût avant d’en arriver à une terrible vérité. Il semble que leur seul critère de validation ait été celui de l’ancienneté. « On ne trouve plus ce genre de choses dans les jeux d’aujourd’hui ? C’est parfait, mettons-ça dans Yooka-Laylee. » Et c’est à ce niveau que Playtonic trébuche sur la voie royale qui était pourtant tracée devant lui . Le studio avait tout pour réaliser un superbe jeu de plates-formes inspiré des classiques d’antan, et transcendé par toutes les innovations, grandes ou petites, apparues dans les années 2000. Au lieu de ça, le studio s’est borné à rester le nez collé à sa copie, comme réfractaire au moindre changement. En résulte un jeu qui correspond effectivement au cahier des charges annoncé, mais qui ne propose rien de plus et qui, hélas, a même du mal à soutenir la comparaison avec ses illustres modèles.

L'avis d'extralife
  1. Développeur : Playtonic
  2. Éditeur : Team17
  3. Genre : Plates-formes
  4. Date de sortie : 11 avril 2017
  5. Supports : PC, Mac, Linux, PS4, Xbox One, Switch
  • Héritier des vieux titres Rare, Yooka-Laylee n’est pas un mauvais bougre ; on prend même un peu de plaisir à parcourir ses différents mondes colorés. Ceci dit, le titre est loin de concrétiser les nombreux espoirs que l’on plaçait en lui puisque sa ligne de conduite résolument passéiste fait planer un certain inconfort de jeu, tout en ouvrant aussi la porte à plusieurs séquences pénibles dont on se serait bien passé. En fait, si Yooka-Laylee était sorti vingt ans plus tôt, le titre aurait probablement été considéré comme un énième jeu de plates-formes soutenant difficilement la comparaison avec les ténors du genre. À défaut du grand cru espéré, on se retrouve finalement avec un vin de table que l’on boira faute d’autre chose.
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Jihem

La découverte de BurgerTime aux débuts des années 80 aura clairement affecté la vie de ce grand bonhomme. Non seulement, Jihem a développé une passion pour les jeux vidéo, mais il a également choisi de s'installer au pays du hamburger. Sa mère est plutôt heureuse qu'il n'ait pas découvert les jeux avec Boogerman.

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1 commentaire

  1. Motteux
    Motteux
    2 décembre 2017 à 21 h 52 min

    C’est subjectif hein, mais je trouve que ya un gros gros problème de lumière sur ce jeu. Surtout en pleine journée le ciel attaque les yeux et crée du flou partout sur le décor.

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