La nouvelle est tombée la semaine dernière, le petit studio breton Sushee a été choisi pour développer le nouvel épisode de la licence Fear Effect grâce au support offert par Square Enix Collective. Encore peu connue du grand public, cette branche éditoriale a deux fonctions au sein du groupe Square Enix. D’une part chercher de nouveaux projets et offrir une certaine visibilité à des petits studios en demandant directement aux joueurs s’ils seraient prêt à soutenir tels ou tels projets avant de donner le feu vert. Le second job de Square Enix Collective consiste à trouver des studios (toujours indépendants) à même de ranimer des licences passées. Dans les deux cas, le rôle de la structure n’est pas celui d’un éditeur traditionnel dans le sens où le studio en question doit lui-même réunir le financement nécessaire au développement. SEC assurera pour sa part la distribution et la promotion du produit.
Sushee est familier des deux facettes de Collective. D’abord avec Goetia qui a attiré le regard de l’éditeur, puis le soutien des joueurs via une campagne Kickstarter réussie (le jeu est désormais disponible sur PC et Mac). Mais la collaboration ne s’est pas arrêtée là puisque le projet de Sushee présenté pour un nouveau Fear Effect a également séduit Square Enix Collective et le titre fait actuellement l’objet d’une campagne Kickstarter.
Nous avons discuté de tout cela en compagnie de Thibaut Romaggi, le directeur créatif du studio.
Thibaut, tu disais être arrivé chez Sushee avec l’idée de Goetia, n’est-ce pas ?
L’idée originale et la Direction Artistique. J’avais des environnements, mais je ne savais pas trop quoi faire avec. Puis on est venu avec cette idée de fantôme et de possession – ce système de pouvoir passer à travers les murs et de posséder un objet à la fois pour résoudre les différentes énigmes et trouver un moyen de les faire passer d’une pièce à une autre. C’était l’idée de base. On était parti au départ sur un petit jeu. On pensait vraiment faire un jeu à la Machinarium en mettant un flash embarqué sur un site pour faire parler un peu du jeu. On s’est vite rendu compte que c’était absolument pas viable parce qu’on avait une map qui était absolument immense et on s’est dit que si on voulait vraiment faire tous les environnements qu’on aimerait bien mettre en place, on allait pas pouvoir, donc on est reparti sur Unity et on a commencé un développement un peu plus sérieux. Ça, c’était il y a deux ans.
Le Kickstarter a été lancé il y a un an à peu près, c’est bien ça…
Il a été lancé il y a un an. On avait déjà une démo de prête, c’est-à-dire qu’on avait déjà commencé à construire une bonne partie de l’univers et à implémenter les mécaniques de base quand on a lancé le Kickstarter. Ce qui aide à se faire une bonne idée du jeu, en le testant déjà. Le jeu aujourd’hui n’a pas beaucoup évolué par rapport à la démo, qui est toujours disponible aux dernières nouvelles. On n’en a pas honte, mais ça a beaucoup avancé depuis.
Est-ce qu’il s’agissait du premier Kickstarter pour chacun de vous ? Vous n’aviez personne déjà habitué à ce système ?
Non, non. C’était la première fois. Collective connaissait un petit peu le système. Ils avaient déjà des Kickstarters, notamment pour Moon Hunters, je crois. On était les deuxièmes ou les troisièmes à avoir un Kickstarter via Collective. Eux avaient l’expérience. Ils savaient à peu près comment gérer le rythme des parutions, des updates, des choses comme ça. Ce sont des petites mécaniques dont nous n’étions pas forcément au fait. Et ça s’est bien passé.
Vous avez travaillé un an avant de lancer le Kickstarter. Collective était déjà impliqué à ce moment-là ?
On n’était pas tous à temps plein dessus. C’était un an passé à deux ou trois personnes. Il y avait déjà une bonne base de gameplay. On savait que c’était viable et on savait qu’on allait partir là-dessus donc on a pu présenter quelque chose de très précis et de fidèle pour le kickstarter et je pense que ça a pas mal aidé.
Tu penses que c’est essentiel pour un Kickstarter d’avoir déjà quelque chose à présenter plutôt que se de lancer sur une simple idée ?
Pas forcément avoir une démo ou un prototype ou autre, mais il faut déjà savoir où on va. Présenter autre chose que des concept arts, je pense que c’est important aussi. Avoir une bonne idée de la DA globale, des mécanismes et autre, je pense que c’est assez important. Je n’ai plus le nom du jeu en tête qui avait aligné un certain nombre de célébrités du jeu vidéo et du cinéma je crois et qui présentait juste des concept arts. Même les phases de gameplay étaient des concept arts. Je crois que le Kickstarter avait été abandonné. Je n’ai plus le nom.
On a vu des exemples comme ça. Donc oui, peut-être pas avoir une démo ou un proto, mais au moins avoir des documents assez solides, et avoir une vision globale claire et solide. Ça me paraît important.
Comment vit-on une campagne Kickstarter de l’intérieur ?
On abîme la touche F5 ! Les premiers jours, on voit le truc grimper très vite en fait. Le lancement de la campagne, c’est là où ça avance le plus vite en général. On se fait une assez bonne idée en deux ou trois jours de là où on va aller. Et après, on passe peut-être un ou deux jours à regarder un peu fébrilement en voyant que ça avance plus. On se détache un petit peu. On prépare les updates, on arrête de se reposer sur ce qu’on avait préparé et on continue à essayer de faire monter le truc. Comme on est alors concentré sur la production de contenu on a un peu moins de temps pour stresser. Généralement, il y a toujours une ou deux semaines un peu plates au milieu. Avec Goetia, on a eu de la chance. Il y a un Youtuber qui avait streamé notre démo et qui a eu beaucoup de succès. Ça nous a fait un petit pic, notamment aux Etats-Unis. C’était plutôt sympa.
Cette semaine, vous relancez une campagne, cette fois pour Fear Effect: Sedna. Est-ce que la campagne est vécue de la même façon que celle de Goetia ?
C’est totalement différent parce que d’une, ça démarre beaucoup plus vite que pour Goetia. On a déjà quasiment atteint la moitié en trois jours. Ce n’était pas le cas pour Goetia. De deux, on s’est approprié le jeu bien évidemment, mais c’est une IP qui ne nous appartient pas. On n’a pas le même rapport au jeu qu’on a pu avoir avec Goetia où c’est viscéral. C’était vraiment notre bébé. Alors là, évidemment, on présente un truc qu’on s’est approprié et dont on est très content et dont on est sûrs, mais je pense, en tout cas en ce qui me concerne, il y a un petit peu plus de recul par rapport à celui-là. Peut-être aussi parce que je suis le plus confiant d’une certaine manière parce que c’est une franchise qui avait bien marché à l’époque et ça se ressent dans les commentaires et les retours qu’on a. Il y avait quand même une fan base qui était bien présente. Du coup, c’est un peu plus rassurant. On est beaucoup moins stressé en général.
Tu disais qu’il s’agit d’une IP qui ne vous appartient pas mais que vous vous êtes approprié le jeu. Comment se passe la création d’un jeu autour d’une IP qui existe déjà ?
Ça passe déjà par refaire tous les jeux pour vraiment bien se remettre dans le truc. Lire des trucs à droite à gauche. Il y a plein de forums qui analysent l’histoire, qui ont des théories sur le scénario, qui les analysent, des choses comme ça. C’est intéressant de les lire. Le truc est que là on voulait vraiment explorer quelque chose de nouveau avec ces personnages que l’on connaît. On avait les trois premiers, dont Inferno qui du coup n’est pas sorti, et pour l’instant, il n’y a pas de plan pour le sortir. Ces trois-là se déroulaient à Hong-Kong donc on a aussi une omniprésence de la mythologie chinoise. On s’est dit que cela fait mine de rien une trilogie peut-être que là on peut partir sur quelque chose de nouveau. Quinze ans plus tard, on a voulu explorer une mythologie dont on n’apprend pas grand-chose dans les manuels scolaires. C’est une volonté de notre part d’explorer ce côté un peu méconnu de la mythologie inuit et qui colle très bien à l’esprit Fear Effect selon nous, dans le sens où c’est un peuple un peu survivant. Ils vivent au milieu des glaces entourés de mers et ils ont une mythologie très dure, très violente. On trouvait que ça collait vraiment bien, que ça nous permettait d’écrire de nouveaux personnages hauts en couleurs tout en gardant les relations entre les quatre personnages qu’on connaît bien et en leur étant fidèles. C’était là la première manière de nous approprier la licence en changeant un petit peu d’univers sans changer l’atmosphère.
J’image que durant ce processus de création, vous avez dû identifier les mots clés qui font de la série Fear Effect ce qu’elle est. Quels sont les mots qui se sont dégagés ?
Il y a l’omniprésence de l’horreur de manière générale. On a un univers qui est, entre nous on dit “un peu crado” mais c’est un peu ça. Il est très poisseux, très dur, assez sombre. Les deux mots qui reviennent les plus souvent sont “cyberpunk”, même si c’est plus futuriste que cyberpunk à mon sens, parce qu’il n’y a pas vraiment de thématique cyberpunk à proprement parler, et “mythologie”. L’aspect mythologique est très important. Ce n’est pas juste reprendre des créatures d’une culture donnée, mais par exemple dans le premier Fear Effet, on avait cette croyance de brûler des munitions en papier en enfer pour qu’elles deviennent réelles. Ce sont tous ces petits détails qui font qu’on rentre vraiment dans le dur de la mythologie et pas seulement rester en surface. Donc on va essayer de retrouver ça dans Sedna en explorant à fond la mythologie Inuit et tout ce qui fait les rituels, les croyances, et puis les créatures mythologies évidemment qui seront forcément là. Donc le côté futuriste d’une part et mythologique de l’autre.
Donc tout ça représente ce que vous avez gardé de Fear Effect. Vous avez changé d’univers, mais tout le reste, dont le gameplay, a l’air d’être totalement différent de ce qu’on connaît.
Alors les deux seules véritables différences seront d’une part la vue – la caméra qui sera fixée en vue de dessus, et le nombre de personnages présents dans l’action. Dans les premiers Fear Effect, on était vraiment dans un côté survival horror. On était tout seul. On jouait les personnages les uns à la suite des autres mais ils interagissaient entre eux que dans les cutscenes. On s’est dit qu’on a quand même une histoire qui est riche, des relations entre les personnages qui sont intéressantes et on avait envie de développer ce côté-là, et pas uniquement dans les cutscenes. Un des moyens intéressants c’est aussi de les mettre tous ensemble, enfin peut-être pas tous ensemble. On aura peut-être certaines parties de l’histoire où des personnages seront joués seuls, d’autres où ils seront deux, trois, quatre, jusqu’à cinq. Avec toujours cette idée qu’on peut les faire interagir entre eux en plein cœur de l’action. Et que pendant que le joueur joue, on les entendra se parler entre eux, faire des remarques, se lancer des pics, faire des blagues… On se disait que c’était l’occasion de pousser à fond les relations. Nous, on aime bien écrire des histoires, on aime bien pousser le scénario et pousser des univers cohérents et assez profonds, du moins on essaye. C’était l’idée qu’on voulait reprendre pour ça et une des raisons qui nous a fait choisir la vue isométrique pour avoir une vue globale et le fait d’avoir plusieurs personnages ensemble sur la même partie à un moment donné.
Du coup vous changez la vue, mais également la plate-forme puisque le jeu est prévu sur PC d’abord, avec un strech goal pour une version PS4. N’avez-vous pas peur de perdre le public qui connaît déjà la série ? Ou au contraire essayez-vous de toucher un nouveau public ?
Clairement, on essaye de toucher un nouveau public. On pense que la fanbase aura toujours plaisir à retrouver les personnages. C’est un peu tôt pour le dire, mais on n’aura sûrement pas un jeu extrêmement gourmand, il ne faudra pas une bête de course pour le faire tourner, ce qui ne devrait pas non plus nous fermer les portes de tous les joueurs habitués aux consoles. Après l’idée est aussi de travailler sur un gameplay qui soit de base totalement adaptable à la manette sur PC ou sur consoles. Car on veut tout de même se préparer à une éventuelle sortie sur PS4 ou sur Xbox One. Ça change effectivement le gameplay. À la souris, on sera plus à donner des ordres, au pad on sera plus à contrôler les personnages un par un et les autres suivront, ce qui sera d’ailleurs plus proche de ce que l’on avait avant dans les précédents Fear Effect.
Ce n’était pas envisagé de partir là dessus dès le départ ?
Non. On est partis sur PC. On ne s’est pas vraiment posé la question. C’était logique pour nous avec une vue isométrique de partir sur PC. Ça nous a paru naturel, en fait. On est tous pas mal joueurs PC aussi, et on travaille sur PC depuis la création de l’entreprise, donc c’était naturel pour nous.
Donc vous avez présenté ce pitch à Square Enix Collective et il n’a pas bougé depuis ?
Il n’a quasiment pas bougé. L’histoire, les environnements que nous voulons visiter et le gameplay n’ont quasiment pas changé non.
On voit sur la page Kickstarter que John Zuur Platten, l’auteur du premier épisode, vous soutien…
C’est nous qui l’avons contacté pour le coup. Il est très enthousiaste. C’est un jeu qu’il aime beaucoup. Il est assez nostalgique de Fear Effect 1 et il était très content de voir ce qu’on en avait fait, il trouvait ça très intéressant, et de pouvoir participer à l’aventure, je crois que ça lui fait plaisir. C’est clairement un atout pour nous. On a beau connaître les personnages, c’est quand même lui qui les a écrits. Et donc on est absolument certains aujourd’hui d’avoir quelque chose de très fidèle dans l’écriture en tout cas, aux deux originaux.
Quand on s’approprie une licence, il y a aussi l’aspect artistique qui entre en jeu. Pas simplement le gameplay ou le propos. Comment travaille-t-on sur des personnages qui existent déjà, un style graphique qui existe déjà. Faut-il le respecter ? L’adapter ?
Pour ce qui est de la modélisation des personnages, nous avons fait appel et nous avons embauché au final un artiste qui est un fan absolu de la série, qui travaille depuis assez longtemps sur la modélisation et la modernisation des personnages. Pour le coup, il a une vision très intéressante et très fidèle de la licence. Donc, ça nous paraissait naturel de faire appel à lui, à la fois en tant que consultant et en tant que modélisateur 3D. Pour ce qui est des décors, c’étaient des décors très réalistes. C’est ce qui faisait aussi la particularité graphique des précédents. On avait des décors réalistes animés et des personnages en simili cel-shading par dessus qui étaient clairement plus orientés comic books ou manga et ça fonctionnait très bien. On a tout de suite essayé de reprendre ça, donc les personnages en 3D, toujours cel-shadés, enfin en tout cas texturés de manière à ressembler à du cel-shading. Et on s’est rendu compte que ça fonctionnait toujours sur des décors photoréalistes. C’est un truc qui a été éprouvé au final. On a quasiment rien inventé à ce niveau-là. On a repris la formule. Elle fonctionne toujours en 2016, même si on l’a modernisée et l’appropriation s’est faite naturellement et assez facilement aussi.
Aura-t-on droit aux voix d’origine ?
Le casting original, on ne le sait pas encore, mais on pense que cela fera l’objet d’un stretch goal sur la campagne Kickstarter. Ils ont fait leur bonhomme de chemin et c’est aussi une question de budget clairement. On va de toute manière essayer de retrouver des voix le plus proche possible, ça c’est sûr.
En lisant l’annonce du jeu, sur Eurogamer, vous disiez que vous ne comptiez pas reprendre la sexualisation des personnages telle qu’elle a été employée pour promouvoir Fear Effect 2. Or, on s’aperçoit sur la page Kickstarter que l’image de présentation de Rain la montre justement en petite tenue avec Hana. Pourquoi ?
On a été très surpris de ça parce que quand on parlait avec Eurogamer, on parlait – de la campagne de communication qui était assez crasse, surtout au niveau du wording, elle les met vraiment en scène de manière à aguicher l’œil masculin. On trouvait ça un peu gênant. Fear Effect reste un jeu où la sexualité, dans son sens le plus large, est omniprésente. On se voyait pas non plus l’enlever. Et il n’en était pas question. Ce qu’on a dit à Eurogamer c’est qu’on ne voulait pas l’utiliser gratuitement et simplement la présenter de manière naturelle parce que ces deux personnages sont en couple, vivent ensemble et on ne veut absolument pas cacher ça non plus. Et tomber sur la page Kickstarter quand on présente les deux personnages de Hana et Rain, on explique qu’elles vivent ensemble à Hong Kong et il nous paraissait logique dans ce contexte là de les montrer ensemble pour montrer que voilà, elles sont toujours ensemble et qu’elles sont toujours en couple et puis voilà. C’est vrai qu’on a été assez surpris des réponses à ce gif-là. Des gens qui nous disaient que nous ne voulions pas mettre de sexualité et la réponse est que nous n’avons pas dit qu’on ne voulait pas la mettre. On a dit qu’elle soit gratuite. On n’a aucune intention d’atténuer ce côté-là de la licence parce que ça fait partie de la licence. Par contre, on compte la décrire de manière intelligente. C’est-à-dire ne pas systématiquement les montrer dans des tenues aguicheuses, juste pour les montrer pour l’œil du joueur. On va faire attention que ce soit justifié par le scénario, dans un instant précis, dans un contexte précis.
Dans le cadre des discussions avec Square Enix Collective, a-t-il été question à un moment ou un autre de ressortir des versions remasterisées des précédents épisodes ?
On a discuté avec Collective d’un nouvel épisode et Collective est en charge de la récupération de la licence pour de nouveaux épisodes par des studios indépendants. À aucun moment, nous n’avons parlé des précédents épisodes. Et ce sera le boulot de Square Enix. Je ne sais pas si Kronos existe toujours, mais ce serait vraisemblablement leur travail. Je m’avance peut-être, mais je ne pense pas que ce soit à l’ordre du jour. On n’en a pas parlé, en tout cas.
Comment se déroule la collaboration avec Square Enix Collective ? L’éditeur fait-il des retouches ? Impose-t-il des contraintes bonnes ou mauvaises dans la vision du jeu pour lequel il vous donne accès la licence ?
Ils nous donnent accès à la série parce qu’ils ont accepté notre projet. À partir de là, on fait absolument ce qu’on veut pour l’instant. Les seules retouches qu’on a pu avoir sont quand on contacte John quand on commence à écrire un personnage et qu’il nous dit “je le verrais plus comme ça” mais c’est John Zuur Platten qui est l’auteur original et ça vous paraît normal. Mais venant de Square Enix Collective, absolument aucune contrainte, non.
Pour revenir à Goetia, le jeu est sorti cette semaine. Quels sont les premiers retours ?
Ça se passe très bien. Pas énormément de retours pour l’instant mais ce que l’on voit est très positif. On est très content de voir qu’ils ont envie d’aller plus loin, que l’exploration fonctionne, que le déroulement de l’histoire a l’air de plaire aux joueurs. On est contents des retours.
D’après ce que j’entends de Dino qui me parle du jeu à peu près tous les jours, les énigmes ont l’air assez ardues. C’était une volonté de proposer un jeu difficile, allant donc un peu à contre courant de ce que l’on voit de nos jours ?
Au delà de difficile, ce que l’on voulait surtout c’est que ce soit un jeu qui ne tienne pas le joueur par la main pour lui montrer où aller, ou ce qu’il doit regarder comme indice. Pour une énigme donnée, on aura tous les éléments en mains pour la résoudre, mais on ne le saura pas forcément. C’est limite prendre un morceau de papier sur le côté et puis noter deux, trois trucs, dessiner un symbole, ce genre de choses peut aider. Et puis bien tout lire. Il y a des choses écrites dans les bouquins qui peuvent donner un indice sur telle énigme. La seule chose qu’on ait faite pour aider un petit peu, c’est le journal. Il retrace un peu tout ce qui a été fait. La double idée derrière est d’une part récupérer le joueur quand il arrête pendant plusieurs jours et qu’il ne sait plus où il en était. Ça récapitule un peu tout ce qui a été fait dans les épisodes précédents. La deuxième idée est de donner des indices et matérialiser la pensée d’Abigail, l’héroïne, qui écrit au fur et à mesure ce qu’elle pense devoir faire mais sans trop donner d’indices. Donc oui, c’était une volonté. On sait que certains puzzles sont assez difficiles. Enfin, puzzles… ce ne sont pas vraiment des puzzles. Je préfère le mot “énigmes” qui reflète plus l’esprit du jeu.
Une question qui m’interpelle toujours en tant qu’amateur de jeux d’aventure : comment conçoit-on les énigmes. Pense-t-on à plein d’énigmes que l’on tente ensuite d’incorporer à une histoire ? Où à l’inverse part-on d’une histoire en réfléchissant aux passages clés où l’on bloquera le joueur ?
C’est toujours important que l’histoire et les énigmes collisionnent tout le temps. Il faut toujours qu’une énigme soit justifiée par l’histoire et que l’histoire rebondisse après une énigme. Là, on a écrit l’histoire avant en mettant des jalons aux endroits où on voulait bloquer la progression du joueur. La création des énigmes, je pense que c’est pas la méthode la plus académique, revient à s’inspirer d’un petit peu de tout ce qui se fait, de ce qu’on a vu dans tous les jeux, dans les Myst, les Lucasarts, les Wadjet Eye, un peu tout mélangé et voir ce que l’on peut en tirer. Et surtout ce qui collerait à l’ambiance du jeu, à l’ambiance du titre. Mais c’est surtout avoir une idée et la mettre à l’épreuve par le test. Après, c’est doser le nombre d’indices, c’est doser la difficulté a posteriori.
Est-ce qu’il y a des plans pour porter le jeu sur consoles ?
Sur consoles, peut-être pas. On s’est posé la question mais on ne voit pas forcément l’intérêt d’une jouabilité à la manette pour un jeu comme Goetia. En revanche, on a évoqué l’idée d’un portage sur mobiles et tablettes.
J’imagine que Sushee sera bien occupé cette année sur Fear Effect. Il n’y a pas d’autres projets en cours ?
Il y a toujours d’autres projets. Mais on va attendre un petit peu avant de commencer à travailler dessus. Si si, on a d’autres projets dans les cartons, mais Fear Effect va nous prendre 95% du temps cette année si le Kickstarter fonctionne. Et puis ce sera pour 2017 éventuellement, oui.
propos recueillis le 15 avril 2016
1 commentaire
Browarr
6 juin 2016 à 20 h 26 minMerci pour cet article !
Cela dit, je ne soutiendrai jamais un projet Kickstarter s’il n’y a pas au minimum une démo technique ou un echantillon de gameplay. Des promesses, le pedigree des dév’ / artistes ou des concept arts ne me suffisent pas.
Le fiasco du Kickstarted de BlackRoom de John Romero et Adrian Carmack en témoigne.
Tout y était sauf du gameplay, le financement a été suspendu le temps que son équipe livre une démo.