Fairy Tile : Le conte défaitTest JDS

Fairy Tile : Le conte défait

Il était une fois deux ménestrels qui eurent une chouette idée pour amuser les familles du royaume. La bonne féé Iello eu vent du projet et prit à cœur d’aider messires Matthew Dunstan et Brett Gilbert dans leur noble mission ludique. Elle plaça sur leur route le célèbre peintre français Miguel Coimbra, réputé par delà le Small World pour ses 7 Wonders. Elle leur fit aussi don de tout le matériel nécessaire à leur réussite, à savoir de belles tuiles et des figurines colorées. Tout était donc réuni pour que le royaume joue heureux jusqu’à la fin de ses jours, mais c’était sans compter sur une vilaine sorcière qui attendait patiemment son heure pour frapper les joueurs et jeter sur eux un soupçon de déception.

Les règles qui encadrent Fairy Tile sont à la fois simples et basiques. À tour de rôle, les joueurs tentent de valider les conditions décrites sur les pages de leur livre (leur paquet de cartes respectifs) en déplaçant un personnage ou en ajoutant un bout de territoire. On essaie ainsi de réunir la princesse et le dragon dans une plaine, ou de placer le chevalier de sorte qu’il puisse voir le dragon. Tout est donc une question de placement sur un plateau qui se construit petit à petit, selon les désirs des joueurs et sans contraintes particulières, si ce n’est qu’il est interdit de couper abruptement un cours d’eau. À la fin de son tour, le joueur actif vérifie si l’objectif est rempli, puis passe à sa carte suivante. Le premier à compléter l’intégralité de son “livre” remporte la partie. En réarrangeant ses objectifs par ordre croissant, il pourra alors lire à haute voix son récit, qui comptera malheureusement d’énormes ellipses, puisque le jeu ne compte qu’une seule histoire éclatée entre tous les joueurs et non une histoire différente par joueur, ce qui aurait été bien plus cohérent.

Vous vous en doutez, les trois personnages obéissent à des règles de déplacement bien précises. Ainsi, la princesse ne peut avancer que d’une case à la fois, mais a la droit de se “téléporter” d’un château à un autre avant ou après avoir bougé. Le chevalier parcourt deux cases, tandis que le dragon vole en ligne droite jusqu’à rencontrer le bord du royaume. L’organisation du trio est rendue délicate par le simple fait que nous ne sommes pas seuls sur le coup, d’autres joueurs tentent eux aussi de guider les mêmes figurines pour remplir leurs objectifs. Par exemple, vous aurez peut-être une carte qui vous demandera de réunir la princesse et le chevalier dans la grande prairie, tandis que votre voisin de gauche essaiera par tous les moyens d’amener la même princesse au sommet d’une montagne. Le problème n’est pas insoluble puisqu’à tout moment, un joueur peut décider de passer son tour et donc de remettre à plus tard son objectif. Sa carte est alors rangée en dernière position de son paquet et en contre partie, ce joueur gagne le droit de jouer deux fois d’affilée lors d’un prochain tour. D’expérience, la tactique se révèle rarement payante dans un jeu où il s’agit tout de même d’aller le plus vite possible.

Le plus souvent, les joueurs tentent un peu le forcing en essayant coûte que coûte de réaliser leurs objectifs dans ce qui s’apparenterait presque à une confrontation basée sur la patience et l’obstination. Rien de bien méchant, mais on aurait éventuellement aimé une règle stipulant qu’il est interdit de réaliser en sens inverse le déplacement qui vient juste d’être effectué par le joueur précédent. Cela aurait d’ailleurs obligé les participants à trouver des solutions créatives pour s’en sortir , plutôt que d’espérer que l’autre finisse par baisser les bras après plusieurs va-et-vient. Le problème est partiellement gommé dans les parties à trois ou quatre joueurs, même s’il faut alors se dépatouiller avec des figurines qui restent rarement en place durant un tour de table complet, rendant les objectifs plus compliqués à accomplir. Les parties ont alors tendance à s’allonger un peu dans cette configuration, jusqu’à même dépasser la limite du raisonnable, puisque le jeu ne devrait pas dépasser les 20 minutes compte tenu de ce qu’il a à proposer. Le problème reste heureusement facile à contourner puisqu’il suffit de limiter le nombre de cartes distribuées en début de partie pour contrôler plus ou moins efficacement la durée de jeu.

Plus ennuyeux, un tel jeu ne devrait pas engendrer l’élimination directe de joueurs par pure malchance. Et c’est pourtant ce qui peut se passer dans Fairy Tile, puisque de rares cartes objectifs demandent aux joueurs de réunir des personnages sur la grande rivière, autrement dit sur une rivière longue d’au moins cinq cases. Or, tant que vous ne verrez pas cet objectif dans votre main, vous n’aurez pas forcément envie de passer un tour à agrandir ladite rivière ; vous espérerez simplement que d’autres s’adonneront à la tâche. Dès lors, si personne ne s’occupe de cette fichue rivière, vous serez peut-être laissé dans l’impossibilité de remplir l’un de vos objectifs, et donc éliminé d’office ! Là encore, il faudra trouver une variante maison pour contourner le problème…

Après quelques parties, tout se met peu à peu dans l’ordre, les zones d’ombres s’éclaircissent et Fairy Tile devient enfin le petit jeu familial léger et sans prétention qu’il prétend être depuis le début. Sous ce prisme-là, Fairy Tile fait alors penser à une version encore plus light de Takenoko, dans laquelle les joueurs tentent de manipuler le plateau et les personnages féériques pour répondre aux objectifs et tourner les pages de ce conte défait. Ça ne va pas chercher très loin, mais pour une petite partie de temps en temps, avec des enfants en âge de savoir lire, ça passe tout seul.

Mise à jour : Contrairement à ce que l’auteur nous avait dit précédemment, les personnages peuvent bien se voir s’ils se trouvent sur la même case. Nous avons donc supprimé les passages du test qui mentionnaient le manque de clarté à ce niveau.

L'avis d'extralife
  1. Auteurs : Matthew Dunstan et Brett J. Gilbert
  2. Illustrateur : Miguel Coimbra
  3. Éditeur : Iello
  4. Genre : Pose de tuiles, placement
  5. Nombre de joueurs : 2 à 4 joueurs
  6. Durée des parties : 20 - 40 mn
  7. Âge recommandé : 8 ans et plus
  8. Sortie : Mars 2018
  • Finalement, Fairy Tile laisse un sentiment assez mitigé. Si le charme opère instantanément grâce au matériel et aux visuels enchanteurs, si nous sommes également séduits par la simplicité de l'idée derrière le gameplay, la longueur des parties mal calibrée ou encore l'aspect narratif mal exploité sont autant d'éléments décevants qui font un peu d'ombre au plaisir de jeu.
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Jihem

La découverte de BurgerTime aux débuts des années 80 aura clairement affecté la vie de ce grand bonhomme. Non seulement, Jihem a développé une passion pour les jeux vidéo, mais il a également choisi de s'installer au pays du hamburger. Sa mère est plutôt heureuse qu'il n'ait pas découvert les jeux avec Boogerman.

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