Fire Emblem Fates : Conquête – Le choix du cœurTest JV

Fire Emblem Fates : Conquête – Le choix du cœur

Avec Fire Emblem Fates, les amateurs de T-RPG se sont retrouvés devant un dilemme inédit dans le cadre de cette franchise. Contraints de faire un choix entre deux versions bien distinctes offrant chacune un point de vue radicalement différent sur le conflit opposant Nohr à Hoshido, les joueurs qui n’avaient pas forcément la possibilité de parcourir les deux titres l’un après l’autre ont souvent pris leur décision en fonction du challenge qu’ils recherchaient. Éminemment plus difficile, la version Conquête constitue en effet un défi de taille, mais nous ne saurions pourtant que trop la conseiller aux adeptes de Fire Emblem Fates : Héritage qui souhaiteraient aller plus loin dans la découverte du background de ce triptyque.

Car il ne faut pas oublier qu’au-delà de ces deux versions, Fire Emblem Fates ne trouve son dénouement véritable qu’au travers d’un troisième scénario censé apporter les réponses à toutes les interrogations soulevées dans Héritage et Conquête, mais nous y reviendrons à l’occasion d’un dernier test entièrement consacré à Révélation. Pour l’heure, voyons plutôt en quoi la découverte de Conquête se justifie pour quiconque aurait déjà terminé la campagne de la version Héritage.

Les racines du mal cachées à l’intérieur du royaume de Nohr

Représentant en quelque sorte le pendant maléfique du conflit opposant Nohr à Hoshido, ce scénario découle du choix fait par Corrin, l’avatar du jeu, d’opter pour la voie du cœur plutôt que pour celle du sang à l’issue du sixième chapitre du jeu. Comme nous l’avons déjà souligné lors du test de la version Héritage, le héros ou l’héroïne que nous incarnons est tiraillé(e) entre la famille royale de Hoshido qui l’a vu naître et celle de Nohr qui l’a certes kidnappé(e) jadis mais qui s’est ensuite chargée de l’élever comme un membre à part entière de son royaume. Dans Conquête, Corrin fait donc le choix se de rallier aux Nohriens, bien que cette lignée soit dépeinte comme étant composée de sinistres individus « misérables, perfides et lâches », que la logique destinerait donc plutôt à devenir les adversaires du joueur défenseur du bien.

Mais le titre ne se voulant clairement pas manichéen, il convient de voir au-delà de la notion de bien et de mal pour comprendre que, si les dirigeants de Nohr sont effectivement corrompus jusqu’à la moelle, la grande majorité des « frères » ayant grandi aux côtés de Corrin sont loin d’être aussi vils qu’on souhaiterait nous le laisser croire. En vérité, en dehors du lugubre roi Garon et de son bras droit Lago, les descendants de Nohr ont une profonde notion de la justice et répugnent à faire couler le sang inutilement. Plus important, ils considèrent Corrin comme un membre à part entière de leur famille et ont à son égard une affection manifeste.

Dès lors, on comprend mieux comment Corrin peut prendre la décision de mettre en péril l’avenir de ses frères de sang Hoshidiens pour combattre aux côtés des Nohriens alors même que ces derniers sont sur le point de plonger le monde dans le chaos. Pour Corrin, il est tout simplement inconcevable d’abandonner la seule famille qu’il a réellement appris à connaître et de tourner le dos à ceux qui seraient prêts à n’importe quel sacrifice pour le garder auprès d’eux. Certes, les agissements sournois du roi de Nohr révéleront de plus en plus ouvertement aux yeux de ses fils la nature profondément mauvaise de celui qui les manipule tous dans l’ombre afin de servir ses ambitions de conquête, mais Garon n’en reste pas moins l’unique père de notre héros qui ne peut décemment pas le condamner sans détenir la preuve irréfutable de ses exactions. C’est donc une campagne placée sous le signe de la défiance qui se développe dans cette version-là, le camp de Nohr étant rapidement victime d’un soulèvement général des héritiers pour échapper au contrôle de leur père sous l’égide de Corrin et du charismatique prince Xander.

fire_embleme_fates_conquete_006L’efficacité du background de Conquête résulte également du déchirement que constitue pour notre avatar l’obligation de lutter contre ses frères de sang, son choix conduisant Ryoma et les autres à ne plus voir en lui qu’un infâme traître possédé par un terrible envoûtement. Mais si elle paraît définitive en début de partie, la rupture entre les deux camps est loin d’être aussi irréversible qu’elle peut le sembler, et c’est justement dans l’espoir de trouver une entente entre les deux royaumes que Corrin et les insurgés de Nohr vont déployer tous les moyens possibles afin d’éviter une scission dans un bain de sang. Opposant aux massacres de Garon la méthode pacifique de la négociation, nos héros vont ainsi tenter de bâtir une relation basée non pas sur l’oppression et la division mais sur l’entente mutuelle, quitte pour cela à jouer double-jeu pour ne pas éveiller les soupçons du roi qu’il convient à tout prix de détrôner afin de construire un monde de paix.

fire_embleme_fates_conquete_007En ce sens-là, le développement du scénario de Conquête est sans doute plus abouti que celui de la version Héritage, mais il s’apprécie surtout à la lumière de tout ce qui a été découvert dans la « première » campagne du jeu. Pour le joueur, le simple fait de voir les anciens alliés de Corrin se détourner de lui ou, pire encore, de devoir défier les leaders de Hoshido et leurs gardiens respectifs après s’y être attaché pendant une bonne trentaine d’heures, donne une saveur accrue à la découverte de l’histoire de Conquête. Ainsi, les événements prennent rapidement une tournure bien différente de la précédente et la perspective d’un affrontement inéluctable contre les imposants Ryoma et Takumi ne peut manquer de faire froid dans le dos, même si l’on devine sans mal que l’issue du conflit se fera très certainement sous un jour favorable.

L’éprouvante et déterminante mise à l’épreuve

fire_embleme_fates_conquete_008Si l’on peut regretter que le jeu n’offre qu’un seul et unique dénouement possible, on peut néanmoins voir à travers la multiplicité des challenges proposés par Conquête un moyen alternatif d’éprouver la valeur de nos unités. Ainsi, bien que la difficulté des missions soit à la hauteur de la réputation de cette version, mieux vaut résister autant que possible à la tentation de se rabattre sur la résurrection éclair des troupes si l’on veut saisir toute la portée du défi que représente le fait de terminer le jeu à l’ancienne. Résidant essentiellement dans l’impossibilité de participer à une infinité de batailles facultatives, ce qui ne permet donc ni de développer les membres de son équipe ni de contourner la limite d’or et d’XP imposée, l’essentiel du challenge de cette version s’illustre aussi dans la complexité accrue de ses différentes missions.

fire_embleme_fates_conquete_009Qu’elles soient liées à la quête principale ou aux défis annexes relatifs à la descendance des héros, les batailles impliquent ainsi toutes des conditions beaucoup plus exigeantes que dans Héritage. À titre d’exemple, les objectifs peuvent notamment requérir la prise d’un emplacement précis rudement gardé ou la défense d’une zone donnée pendant un nombre de tours imparti, ce qui incite à recourir aux balistes, lanceurs ou globes de feu, voire au déplacement de décombres permettant de dresser des barricades. Une façon de procéder étonnante pour un T-RPG, qui conduit même parfois à faire preuve de discrétion en se faufilant à l’insu des gardes afin de se rapprocher le plus possible d’un allié, quitte à briser des murs pour emprunter certains raccourcis.

fire_embleme_fates_conquete_010Très franchement, l’inventivité dont fait preuve la version Conquête à travers le déroulement des batailles fait plaisir à voir, allant jusqu’à nous forcer par exemple à prendre contact avec des sentinelles pour démasquer le chef adverse et à bien comprendre le fonctionnement des veines dragunaires pour prendre l’avantage. Foncer tête baissée ne mène jamais à rien et la diversité des veines en question étonne là encore bien plus que dans Héritage où l’on déplorait justement un manque d’inspiration dans le déroulement des missions. Ici, les têtes couronnées de Nohr ont la possibilité d’activer les veines dragunaires pour, par exemple, bloquer l’arrivée de renforts en embrasant les forêts alentour, aplanir des murailles ou soulever des barrières afin d’endiguer les assauts ennemis, et même ouvrir des voies secrètes dans des grottes truffées de pièges. Parfois, ces derniers font preuve d’une sournoiserie rare en impliquant la gestion de courants aériens au pattern bien défini, dont il n’est possible de compenser les aléas qu’en intervenant à l’aide des veines pour chasser les unités adverses sans risquer de voir les nôtres disparaître à l’autre bout de la carte. On trouve même des jarres qu’il convient de briser ou non selon la situation parce que leur contenu est susceptible d’infliger des bonus ou des malus de poison à toutes les troupes situées à proximité. Enfin, à l’occasion d’un rapide séjour au pays des abysses, des veines encore plus étonnantes nous inviteront à créer des doubles de nous-mêmes aux côtés de ceux qui se trouvent entre la vie et la mort afin de repousser des envahisseurs spectraux.

On le voit, la complexité des batailles de Conquête en fait sa principale richesse, mais ce n’est pas le seul point fort du jeu. Ainsi, là où la campagne hoshidienne misait essentiellement sur l’attrait que représentait l’univers féodal japonais, celle de Nohr compense le classicisme de son background médiéval occidental par un déploiement d’unités plus tourmentées. Berserkers bouillonnant de rage, chevaliers au regard insondable, mages sombres appelés à devenir sorciers ou paladins noirs, bellicistes juchés sur de puissantes wyvernes et autres assassins de toutes sortes sont le reflet des différentes classes qui caractérisent le peuple de Nohr. Aux ninjas de Hoshido s’opposent ici des hors-la-loi ou aventuriers capables aussi bien de faire sauter n’importe quel verrou que de désarmer des pièges ou de capturer des prisonniers pour les enrôler ensuite définitivement au sein de l’armée nohrienne. Le folklore local implique désormais des Ulfhedin, sortes d’hommes-garous détenteurs de bestipierres qui contrôlent leurs transformations en créatures effroyablement puissantes. Désormais ennemis, les Kitsune (hommes-renards), qui honnissent véritablement les hommes de Nohr parce qu’ils les traquent depuis toujours pour leur fourrure, sont capables de recourir à des illusions qui se traduisent par l’annulation pure et simple des dégâts causés et reçus pendant certains tours.

Finalement, tous les aspects du jeu, qu’ils soient relatifs au challenge global ou au développement des classes, contribuent à une recherche poussée dans la mise en place de handicaps inédits qui confèrent à Conquête une allure bien différente de celle des Fire Emblem habituels. Rien que pour cela, la découverte de cette version s’impose à tout amateur de T-RPG, même s’il reste préférable de débuter l’expérience Fire Emblem Fates par la version Héritage, plus permissive, qui demeure l’introduction la plus logique à cet étonnant triptyque.

Note : Ceci est un complément au test de Fire Emblem Fates : Héritage qui comporte davantage d’informations concernant le gameplay et le contenu du triptyque.

L'avis d'extralife
  1. Développeur : Intelligent Systems
  2. Editeur : Nintendo
  3. Genre : T-RPG
  4. Support : 3DS
  5. Date de sortie : 20 mai 2016
  6. Site officiel : https://www.nintendo.fr/
  • fire_embleme_fates_conquete_boxJuste complément à l'expérience de jeu offerte par la version Héritage, Fire Emblem Fates : Conquête met en lumière les motivations de ceux qui sont bien plus que de simples pions entre les mains d'un régent corrompu. Descendants d'une lignée maudite dépeinte comme seule responsable de tous les maux dans la campagne précédente, les Nohriens font valoir ici leurs raisons de revendiquer le trône pour tenter à leur façon de trouver une issue pacifique au conflit. À l'image des héritiers de Norh, c'est donc une seconde campagne tourmentée qui nous est proposée dans Conquête, certes moins facile d'accès que celle de Héritage mais étonnante dans son déroulement truffé de subtilités et de pièges retors.

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2 commentaires

  1. Browarr
    2 août 2016 à 17 h 14 min

    Merci pour ce test.

  2. Painwinter
    Painwinter
    3 août 2016 à 12 h 10 min

    Raaah cette DA !

    Ça m’énerve que j’ai autant de mal à accrocher à ce type de gameplay. Niveau scénario, ambiance et direction artistique ça a l’air terriblement bon. :(

    En tout cas merci pour le test !

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