Dans la nuée de titres sous licence Warhammer à sortir d’ici le printemps 2016, Vermintide n’était pas le moins attendu. Le studio suédois Fatshark, qui a déjà fait ses preuves dans le domaine du jeu d’action coopératif avec des productions comme Lead and Gold ou War of the Roses, a choisi cette fois de se glisser prudemment dans les chaussons de Left 4 Dead, les corps-à-corps furieux contre la horde Skaven succédant aux gunfights endiablés contre les zombies. Warhammer – The End Times : Vermintide est-il donc condamné à rester dans l’ombre de son prestigieux modèle ?
Annoncée dans de vieilles prophéties, la Fin des Temps approche. Les Dieux Sombres ont commencé à déverser leurs légions chaotiques aux quatre coins du Vieux Monde. Alors que les armées de Karl Franz s’affairent à repousser les invasions qui menacent les frontières du Nord, un danger bien pire se prépare à ravager l’Empire de l’intérieur. C’est dans la cité d’Ubersreik qu’il se manifeste en premier. Des couinements sinistres émanent de sous la surface, et avant que les milices restées en faction aient eu le temps de réagir, la horde vermineuse Skaven s’est déjà répandue dans la ville. Rien ne résiste à la sauvagerie de ces hommes-rats, qui pillent les réserves, brûlent les bâtiments et massacrent sans pitié ceux qui se mettent en travers de leur chemin. En quelques heures, Ubersreik, pierre angulaire du Saint Empire de Sigmar, est envahie. Par chance, cinq héros en quête de faits d’armes et de renommée décident de s’unir afin de contrecarrer les plans maléfiques du Rat Cornu…
Warhammer – The End Times : Vermintide est un FPS coopératif en ligne fortement inspiré de Left 4 Dead, dont il singe bon nombre de mécaniques. Si vous avez déjà joué au jeu de Valve, il y a fort à parier que vous retrouverez très vite vos repères. Du principe général, qui oppose un groupe de quatre joueurs à des hordes de créatures enragées, jusqu’à la mise en scène très cinématographique, qui introduit chaque nouvel environnement à grand renforts de travellings, la copie est presque parfaite. Les infectés ont été troqués contre des Skavens tout aussi hargneux, qu’il vous faudra éliminer pour pouvoir progresser à travers les niveaux, accomplir les objectifs intermédiaires et rallier la charrette d’Oleysia – qui a valeur de refuge sécurisé. Tout au long de votre parcours, le rythme variera, alternant les moments d’accalmie relative et les vagues d’adversaires qui vous submergent. Régulièrement, des Skavens « spéciaux » s’inviteront à la fête. Là encore, aucune prise de risque : Fatshark a puisé dans le bestiaire de Warhammer pour trouver des équivalents à ceux de Left 4 Dead. Le coureur d’égouts et le chef de meute, clones du hunter et du smoker, sont les plus létaux puisqu’ils ne vous laissent aucune chance de réplique : l’un vous cloue au sol et l’autre vous extirpe du groupe en vous attirant vers ses congénères. Il y aussi le globaldier, variante du spitter qui vous bombarde de fumée toxique, le mitrailleur ratling qui vous arrose de malepierre, les détachements de vermines de choc surarmurées, ou encore le fameux rat-ogre dont la puissance et la sauvagerie n’ont rien à envier au tank de Left 4 Dead. Une étroite collaboration sera nécessaire pour venir à bout de ces menaces qui surgissent aléatoirement (trop souvent au pire moment). Un seul mot d’ordre : rester groupir !
Plus encore que son modèle, Vermintide mise sur la cohésion du groupe en proposant cinq héros typés et complémentaires en provenance de l’univers de Warhammer. Ils possèdent tous une arme de mêlée et une arme à distance (offrant deux utilisations chacune) qui font leur spécificité. Le soldat de l’Empire dispose d’une force de frappe impressionnante et d’une solide armure, le ranger nain se sert de son bouclier pour repousser et projeter au loin ses adversaires, la sorcière flamboyante puise dans les vents de magie (qui peuvent se retourner contre elle) pour créer des explosions destructrices, la forestière elfe compense sa fragilité par une stupéfiante cadence de tir à distance, et enfin, le répurgateur peut tirer en rafale avec son duo de pistolets à répétition. Même si elle aurait pu être encore plus poussée, la synergie entre ces personnages est bien réelle ; on s’en rend compte en tenant un corridor avec le nain pendant que ses acolytes arrosent la vermine à distance, ou bien en protégeant la sorcière pendant qu’elle incante ses aoe. Il est appréciable de disposer de rôles déterminés, mais sans doute encore plus de pouvoir les nuancer à loisir en changeant d’équipement. Vermintide inclut en effet un système de loot aléatoire basé à la fois sur votre performance en jeu et sur la récupération de certains items (dés spéciaux, tomes) augmentant votre chance d’obtenir un équipement rare. Ce risque supplémentaire peut en valoir la chandelle, d’autant que les tomes sont toujours placés au même endroit (un parti-pris qui fait débat). Le lobby sous forme d’auberge à partir duquel vous lancez le matchmaking permet de changer d’équipement, mais aussi de les améliorer ou d’en créer de nouveaux en recyclant ceux dont vous ne vous servez pas. Cette course au stuff est d’autant plus plaisante qu’elle n’est pas indispensable, les bonus accordés ne générant pas de gros déséquilibre.
Il reste que cette possibilité de jouer sur l’équipement pour varier sensiblement l’approche de chaque classe confère à Vermintide une dimension RPG/optimisation que ne possédait pas Left 4 Dead. Dommage que dans le feu de l’action, ces velléités tactiques aient tendance à laisser la place à une mêlée confuse à base de clics frénétiques. Il faut dire que la lisibilité des corps-à-corps n’est pas optimale, la palette de couleurs « dirty-fantasy » typique de Warhammer n’aidant pas vraiment. On comprend d’ailleurs pourquoi Fatshark n’a pas souhaité inclure de friendly fire pour les armes de corps-à-corps (même dans les modes de difficulté supérieurs) ; cela n’aurait fait qu’accentuer la confusion générale. Si l’on ajoute que l’évaluation de la portée de frappe est parfois un tantinet malaisée, on pourrait arguer que le combat à distance est plus concluant. Ce serait ignorer le plaisir viscéral qui se dégage de ces phases de corps-à-corps particulièrement dynamiques, qui donnent l’occasion d’esquiver, de parer ou de repousser les assauts adverses, avec un feeling des armes très travaillé, et qui ont le mérite de vous plonger dans une action intense et brutale où le sang gicle et les têtes sautent à foison (la localisation des dégâts est gérée). Au-delà de ça, Vermintide a la particularité de proposer une difficulté assez corsée. L’impossibilité de continuer à épauler vos compagnons lorsque vous tombez à terre, le temps qu’ils puissent venir vous relever, rend le jeu sans doute encore plus ardu que ne l’était Left 4 Dead. Comme dans ce dernier, il faudra utiliser à bon escient les objets de soin, les bombes et les potions de boost récupérées çà et là. Qui plus est, chaque type de héros requiert bien plus de maîtrise qu’il n’y paraît, une maîtrise dont le niveau d’expérience global d’un joueur donne parfois une fausse idée.
Le principal reproche que l’on puisse adresser à Vermintide, outre l’effet de surprise qui n’est plus le même ou bien encore l’absence dommageable de mode Versus, tient dans la répétitivité inévitable de l’action. Un sentiment de lassitude peut finir par poindre à force de relancer les mêmes niveaux pour looter un matos décent et passer au mode de difficulté supérieur. On peut regretter que les seuls éléments aléatoires résident dans l’apparition des Skavens et le contenu des coffres. Les objectifs intermédiaires, eux, restent invariablement les mêmes et se montrent surtout trop redondants d’un niveau à l’autre. Au bout du énième sac de grain récupéré, du énième pilier détruit ou du énième puits défendu, on ne peut s’empêcher de penser qu’il aurait été judicieux d’essayer de varier davantage les objectifs. C’est d’autant plus dommage que les 13 niveaux proposés, que vous débloquerez au fur et à mesure, sont admirablement bien pensés. Il y en a de plus courts que d’autres, matérialisés comme tels sur la carte de la ville, qui vous assignent un unique objectif et ne renferment pas les fameux tomes déterminant la qualité du loot. Mais tous possèdent un level design particulièrement soigné et une ambiance spécifique – un vrai tour de force dans cet univers ultra-référencé : des rues médiévales, des remparts et des quais d’Ubersreik en passant par le cimetière des Jardins de Morr et les tunnels Skavens, vous n’évoluerez jamais deux fois dans la même atmosphère. On peut simplement regretter que les niveaux soient indépendants les uns des autres, et ne s’inscrivent pas dans une continuité comme dans Left 4 Dead, où les différentes campagnes étaient segmentées en plusieurs niveaux successifs (une des meilleures idées du titre). Il y avait peut-être matière à un surcroit de scénarisation.
Vermintide bénéficie enfin d’un rendu visuel plus que correct, qui flatte même régulièrement la rétine. L’optimisation, qui laissait à désirer durant les premières bêtas, a été franchement améliorée, même si on déplore encore quelques chutes de framerate par endroits. L’ambiance sonore se montre par contre moins convaincante qu’elle ne l’était dans Left 4 Dead, avec des sonorités perfectibles, des compagnons trop bavards qui couvrent souvent les signaux d’apparition des « spéciaux », ou encore un Jesper Kyd qu’on a connu plus inspiré. On pointera aussi la localisation française incomplète, les bots aussi stupides qu’inutiles ou encore les possibilités de cheat dues à quelques bugs résiduels. Ces quelques défauts n’entravent pas le plaisir de jouer à Vermintide qui, pour moins de 30 euros, vous offrira des heures d’un défouloir épique et grisant.
- Développeur : Fatshark
- Editeur : Fatshark
- Genre : FPS coopératif
- Multijoueur : 4 joueurs en ligne, possibilité de jouer seul avec des bots (non conseillé)
- Date de sortie : 23 octobre 2015
- Support : PC
- Warhammer – The End Times : Vermintide ne se destine nullement aux seuls inconditionnels de la franchise, mais s'adresse à tous les amateurs d'action intense et frénétique à pratiquer en coopération. Passé le temps d'adaptation où ses similitudes avec Left 4 Dead sautent à la figure, le titre de Fatshark finit par faire valoir ses qualités propres : des corps-à-corps dynamiques et viscéraux, des héros typés et complémentaires, un système de loot addictif et un level design brillant. Si l'effet de surprise n'est plus le même, et si la lassitude finit par poindre devant la redondance de ses objectifs et l'absence de mode Versus, Vermintide reste une excellente alternative à son modèle.
7 commentaires
ExtraLoose
7 novembre 2015 à 16 h 36 minPas de jeu local possible, comme d’habitude, j’imagine…?
Merci le Online.
Platinum
7 novembre 2015 à 19 h 56 minMerci pixou pour le test !
CaptainIcecube
8 novembre 2015 à 4 h 49 minIl m’intéressait déjà, et il me fait d’autant plus envie maintenant. Merci pour le test. J’espère d’ailleurs que vous testerez Mordheim: City of the Damned, qui à l’air prometteur lui aussi.
ramenos
9 novembre 2015 à 19 h 28 minJ’y joue depuis la betâ. Je confirme que c’est un bon jeu en coop, fun et simple à prendre en main. Par contre, il reste encore quelques bugs, quelques plantages et le framerate varie pas mal selon le nombre d’ennemis à l’écran.
Nigel
10 novembre 2015 à 9 h 31 minMerci pour ce test ! Il me reste une question en suspend cependant, étant donné qu’il est présenté principalement comme un jeu coop. Pour quelle(s) raison(s) déconseilles-tu de jouer à Warhammer – The End Times : Vermintide en solo ?
Personnellement j’avais absolument adoré Hellgate : London malgré ses énormes défauts et son manque de finition, et pourtant j’y ai longtemps joué seul. La répétitivité est souvent un problème lorsqu’on enchaine de nombreuses heures de jeu, mais celle-ci se révèle généralement moins gênante (voire pas du tout) lorsque nos sessions de jeu sont suffisamment courtes et espacées. En effet, en tant que joueur nos conditions et notre expérience de jeu ne sont pas toujours équivalentes à celles d’un testeur qui enchainera bien souvent de nombreuses heures consécutives sur un seul et unique jeu. Notre rapport à la répétitivité est donc parfois bien différent.
Pixelpirate
10 novembre 2015 à 10 h 09 minSalut Nigel, le problème du “solo” de Vermintide – à savoir le jeu avec les bots – est qu’il est pratiquement injouable. Les bots sont bien trop peu réactifs contre la horde Skaven, ne relèvent que de façon très erratique leurs comparses tombés à terre, et surtout – surtout – ne ramassent JAMAIS les objets, ce qui rend la complétion de certaines maps quasi-impossible (je pense à celle du port et à celles où il faut récupérer des sacs de grain – désolé je n’ai plus les noms sous la main). Même en réglant la difficulté sur facile, les bots sont inaptes à te fournir l’aide nécessaire pour venir à bout du challenge proposé par le jeu. C’est un vrai problème de game design, que je ne savais pas si je devais sanctionner trop durement. Considérant que le jeu est avant tout tourné vers la coopération en ligne avec d’autres joueurs, je n’ai pas considéré ça comme un problème “majeur”, mais il sera peut-être perçu comme tel pour une certaine catégorie de joueurs, – ce que je comprends parfaitement.
Nigel
10 novembre 2015 à 14 h 02 minAh il s’agit vraiment d’une question d’orientation du game design en effet… Merci infiniement pour cet éclaircissement ! ;)
Je suis d’accord, compte tenu de la communication qui en est faite autour de l’aspect co-op, on peut difficilement considérer les fautes de gameplay solo comme étant une problématique majeure.
Ca vaut toujours le coup de demander cependant, il arrive très souvent qu’un jeu très orienté multi / coop soit aussi très satisfaisant en solo (volontairement ou non). Je pense à Phantasy Star Online par ex, qui a eu un succès énormissime à la fois online et offline solo.