Mirror’s Edge Catalyst : La Catalyst des coursesTest JV

Mirror’s Edge Catalyst : La Catalyst des courses

Petit moment d’originalité lors de sa sortie en 2008, Mirror’s Edge jetait les habitudes FPS de Dice du haut d’un immeuble afin de se libérer de la violence pour gagner en souplesse. Glorifiant le parkour en tant que façon d’appréhender la ville, séparé de l’obligation de se heurter à une société fermée, le jeu était une vraie nouvelle méthode d’immersion. La fluidité devenait une arme, le réflexe la meilleure armure. Sous le déguisement du reboot, Mirror’s Edge Catalyst tente de réitérer l’expérience, presque 10 ans après. Il aurait sans doute fallu s’échauffer avant de se jeter.

mirrors_edge_catalyst_0012Mirror’s Edge Catalyst est le symptôme d’une grande maladie actuelle, l’exploitation d’une licence, ou tout du moins l’ « extension » d’un univers sans vraiment comprendre les raisons de son aura. Loin d’être un succès, appartenant davantage au domaine du gros bide, Mirror’s Edge premier du nom fonctionnait sur son concept innovant, son sentiment de course effrénée et la puissance visuelle de son univers. Il concentrait son efficacité, notamment dans sa construction fermée en sessions qui étaient autant d’épreuves aux objectifs précis. Le nouvel épisode de DICE met un coup de pied dans ces conditions d’un autre âge et tend la jambe vers la modernité en proposant une zone ouverte où la varappe, les cabrioles et le parkour ont enfin accès à la liberté. Sur la feuille de route, tout devait bien se passer, les immeubles devenant un champ de possibles bétonnés, les échafaudages un labyrinthe moderne épuré. Mais au lieu de regarder vers un Dishonored qui multipliait les interactions et favorisait l’imagination ludique, Mirror’s Edge Catalyst a trébuché sur un plan de jeu à l’Ubisoft. Les conséquences sont nombreuses et connues, multiplication de quêtes annexes ineptes basées sur du transport de documents, tours à désactiver, PNJ inconsistants pourvoyeurs de tâches tout aussi passionnantes, les à-côtés du jeu remplissent à peine leur rôle. Pourtant, en général, ce genre d’activité a au moins comme intérêt de participer à l’apprentissage de la carte et à la mémorisation des meilleurs tracés, afin de donner un peu plus d’espace à sa fierté de gamer esthète. Ce qui aurait pu sans problème être le cas si tout ce qui entoure Glass City n’était pas un mensonge.

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Sous couvert de monde libéré de toutes contraintes, Mirror’s Edge Catalyst enferme pourtant le joueur dans un immense environnement de surprises illogiques. Malgré les magnifiques panoramas de verre et d’acier qui se dressent devant les baskets de Faith, là où elle va, comme dirait le Doc, elle n’a pas besoin de route. Tout simplement parce que la manière de parvenir à une destination est balisée, sans espoir de faire du hors-piste, sauf à se retrouver coincé derrière un mur ou spectateur d’un game-over. La logique du jeu se base en effet sur un principe maudit du game-design reposant sur l’idée de mettre fin à la partie si le joueur fait ce que les développeurs n’ont pas voulu qu’il puisse faire.

mirrors_edge_catalyst_0007Impossible de se faire un petit plaisir en coupant par un raccourci évident, impossible de sauter sur cette corniche peu élevée pour se repérer, la moindre escapade est sanctionnée par un décès. Le problème étant qu’il n’existe aucun indice visuel, aucune communication mise en place entre le joueur et le game-design pour lui donner des clés de compréhension lui évitant de claquer sans raison apparente. En résulte donc une soumission désagréable à un jeu qui aurait – et il est triste de l’accepter – mérité d’être rempli de murs invisibles. Pénible, mais cela aurait eu le mérite d’afficher la clarté des intentions de DICE. Le premier Mirror’s Edge était bourré de défauts, mais avait pour lui de limiter l’action dans des espaces où le joueur ne ressentait pas cette déception du biscuit promis puis retiré avec une gifle. Dans un contexte narratif où la privation est centrale, le paradoxe est total. Le côté grisant de sauts et jolies galipettes enchaînés est toujours présent, mais tous les ajouts, du grappin au treuil, demandent d’être placé à un endroit spécifique et de viser un élément prédéfini sans aucune latitude possible. Toute la fougue de la prise de risque en bord de toit, toute la légèreté féline de Faith se dissolvent dans ces interdictions répétées sans cesse.

mirrors_edge_catalyst_0003Un tableau très sombre pour un jeu se déroulant à Glass City, qui dispose tout de même encore de quelques touches de clarté lors de moments de grâce. Hors des quêtes annexes dispensables, les missions principales s’articulent autour de bonnes intentions de gameplay, variant les types de tâches à accomplir et permettant enfin de tirer parti un minimum de ses acquis et de son cerveau. Institut à infiltrer, tours à gravir, poursuites, les activités se suivent et dessinent enfin une certaine cohérence, diffusant un plaisir de jeu réel. Très relativisé par une I.A catastrophique, ce dernier surgit tout de même régulièrement et confère ces sensations de vitesse, d’être le maître – ou la maîtresse – d’un monde du dessus qui semblaient avoir disparu à jamais. En un sens, Mirror’s Edge Catalyst est une création étouffée qui brille dès qu’elle respire. Elle irradie de beauté quand sa DA cueille au gré d’un coup d’œil furtif, elle subjugue dans un moment rare de parkour entêtant et parfois surprend par un détail qui fait basculer dans une admiration. Ou tout du moins une envie. Ce moment où, le joueur seul à la pointe d’une grue, à plusieurs centaines de mètres d’altitude, surprend un avion qui souligne d’un trait fin le soleil couchant. C’est derrière cet horizon que se cache le désir. Celui de se barrer de cette cité cloisonnée pour aller profiter de la jouissance d’une liberté de mouvement dans un meilleur cadre. Toute la beauté et le drame de Mirror’s Edge Catalyst.

L'avis d'extralife
  1. Développeur : DICE
  2. Éditeur : Electronic Arts
  3. Genre : Action
  4. Date de sortie : 9 juin 2016
  5. Supports : PS4, Xbox One, PC
  6. PEGI : 16 ans et plus
  7. Site officiel : http://www.mirrorsedge.com/
  • mirrors_edge_catalyst_boiteReprise d'un jeu qui avait l'aura touchante d'une bouteille à la mer ludique, pleine de promesses et passionnante malgré son contenu abîmé par le temps, Mirror's Edge Catalyst arrive lui avec ses godasses à la mode et ses certitudes. Une attitude de messie new-age qui malgré sa connaissance de son public livre des sermons qui n'ont plus beaucoup de sens. Handicapé par une ouverture qui se résume à un level-design difficilement lisible, des errances de game-design et des quêtes annexes insipides, le jeu de DICE peine à retrouver la fougue de son prédécesseur. Pourtant, à quelques moments, il se lève au-dessus des immeubles et trouve son propre style, viscéral, varié, intéressant, le temps des missions principales et de moments de contemplation, soulignés par une DA magnifique. Pas désagréable à jouer, la plus grosse erreur de Mirror's Edge Catalyst est de ne jamais avoir su utiliser son monde et son concept pour autre chose que de la copie d'un cahier des charges éculé. Quand le désir nostalgique devient un outil marketing, il n'en ressort que rarement du bon.
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Killy

Ayant longtemps pensé que le fait de passer ses après-midi dans les bois à chercher des animaux lui faisait gagner des points d'XP et des gils, Pierre a depuis compris qu'il pouvait faire la même chose sur un PC ou une console sans alerter la SPA ou se prendre la balle perdue d'un chasseur.

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7 commentaires

  1. Syphillis
    Syphillis
    2 juillet 2016 à 21 h 56 min

    Ca c’est bien dommage ce que je lis-là… Un jeu que j’attendais avec impatience avec cependant la petite voix qui me disais : “attention, ça sent la bouffe qui a tourné et qu’on va faire réchauffer en y ajoutant du ketchup.”
    Malheureusement ça a fort l’air d’être tombé dans ce piège. Ca m’empêchera pas de l’acheter une fois que j’aurai fini les 2 milliards de jeux en attente.

    A côté de ça, j’aime bien a plume du critique, je crois que c’est a première fois que je lis Pierre Maugein.

    1. Jihem
      Jihem
      4 juillet 2016 à 16 h 09 min

      Je suis également très refroidi par l’avis de Pierre. Je jouerai peut-être à Mirror’s Edge Catalyst un jour, mais il ne fait plus du tout partie de mes priorités.

  2. foumarc
    foumarc
    5 juillet 2016 à 12 h 41 min

    Je soupçonne l’auteur de ce test d’être un fan de Dishonored et d’être désappointé de ne pas avoir de monde semi ouvert… Cette franchise est un jeu “couloir”, c’est sévère d’en attendre autre chose… voir malhonnête…

    1. Jihem
      Jihem
      5 juillet 2016 à 17 h 06 min

      Ce n’est pas malhonnête d’attendre ce que l’éditeur te fait miroiter. Et pour Mirror’s Edge Catalyst, EA et DICE ont clairement laisser entendre que nous serions plus libre d’aller là où on veut pour explorer entre les missions.

  3. SiZZiGY
    SiZZiGY
    5 juillet 2016 à 21 h 51 min

    J’ai fais la béta et je n’ai absolument pas été baffé comme le premier, par conséquent je ne me suis pas jeté sur le jeu. Alors oui c’est joli et la joie de retrouver l’univers est certaine, mais la fraicheur pour moi est passé, c’est une suite qui a manqué d’arguments dans sa béta pour me faire succomber à ses charmes et je vois que je n’ai peut être pas eu une si mauvaise intuition… Le premier restera cependant pour moi un doux plaisir auquel je reviendrais quand le moment sera opportun!

    1. Jihem
      Jihem
      6 juillet 2016 à 19 h 22 min

      Décidemment, Mirror’s Edge Catalyst donne de moins en moins envie.

  4. Elerez
    Elerez
    4 mars 2017 à 18 h 36 min

    Je trouve ce Mirror’s Edge Catalyst intéressant… Pour moi certains point sont mieux que le premier et d’autres le sont moins…

    Sincèrement j’ai apprécié jouer a ce Catalyst les déplacement grisant et le nouveau système de combat sont prenants, mais le vrai problème de ce Jeu est sa construction générale son level design et son monde ouvert ne sont pas du tout intuitifs et pas forcément bien pensé ou bien faits.

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