Depuis la nuit des temps, l’île merveilleuse de Genesia attire toutes les convoitises. À travers les âges, elle est le théâtre d’une lutte farouche entre les peuplades environnantes, qui cherchent à tout prix à s’approprier toutes ses richesses. Vous incarnez le descendant de l’une de ces civilisations et vous devez faire prospérer votre lignée pour asseoir votre suprématie sur le Continent et l’île de Genesia.
Genesia est un jeu de draft et de conquête de territoires dans lequel chaque joueur devra faire évoluer sa civilisation sur trois âges afin de contrôler un maximum de régions, réparties sur les différents continents et sur l’île centrale du plateau. Au début d’un âge, les peuplades doivent drafter cinq cartes pour constituer leur main puis les poser (en payant le coût indiqué, le cas échéant) pour en appliquer les effets (recrutement et déplacement de clans, etc.). Au fil de la partie, les joueurs s’approprieront de nouveaux territoires (par la force ou non) et marqueront des points de victoire. Au terme des trois âges, la civilisation ayant obtenu le score le plus élevé est déclarée vainqueur. Maintenant que les présentations sont faites, voyons un peu plus en détail comment se déroule une partie.
Trois phases distinctes viennent rythmer un âge et chacune d’elles doit être accomplie par l’ensemble des joueurs (en suivant l’ordre du tour) avant de passer à la suivante. La première phase, dite de croissance, permet de recruter de nouveaux clans moyennant un coût de deux pièces par clan recruté (les participants récupèrent 15 pièces au début d’un âge). Au départ, seule votre terre natale peut accueillir de nouvelles unités, d’où l’intérêt de poser des cartes de croissance (représentées par une icône verte) offrant notamment la possibilité de déployer des hommes sur des territoires plus éloignés, qui rapportent plus de points en fin de partie. C’est aussi l’occasion d’afficher vos premiers progrès technologiques sous la forme de cartes Invention, bien souvent déterminantes dans le décompte final. Soyons clairs, les premières phases de croissance ne sont pas les plus palpitantes du jeu, elles servent essentiellement à poser les premiers jalons de votre stratégie, que vous n’oublierez pas d’articuler autour de votre objectif secret (choisi en début de jeu parmi deux cartes), véritable fil conducteur de votre partie.
Vient ensuite la phase d’expansion, qui permet de déplacer vos troupes grâce aux cartes correspondantes (icône rouge) ou en dépensant des pièces d’argent. C’est donc durant cette phase que vous allez positionner judicieusement vos pions pour préparer les assauts à venir et asseoir un peu plus votre suprématie. En effet, en plaçant au moins deux unités dans une région, vous aurez la possibilité à la fin de l’âge d’y bâtir une cité, dont l’intérêt stratégique est double : non seulement elle marque à elle seule la possession d’un territoire, mais elle peut également accueillir de nouveaux hommes. Vous avez donc tout intérêt à construire rapidement des cités dans les régions les plus éloignées de votre terre natale, voire sur Genesia, afin d’y renforcer vos positions et de vous garantir un grand nombre de points de victoires. À noter qu’il est encore possible durant cette étape de recruter de nouveaux clans, selon les mêmes règles que précédemment. En fonction de votre stratégie et de l’ordre du tour, il peut s’avérer plus intéressant d’attendre cette phase d’expansion pour déployer des unités, afin de réagir aux actions de vos adversaires et d’éventuellement contrecarrer leurs plans.
Enfin, la phase d’attaque n’est pas systématique puisqu’elle n’a lieu que si un ou plusieurs joueurs décident de faire la guerre. En début de phase, ces derniers prennent leur jeton Guerre ou Paix et révélent simultanément une face. Si tous les participants ont choisi la paix, on passe directement à la fin de l’âge et au décompte intermédiaire. Si au moins l’un d’entre eux est d’humeur belliqueuse, un assaut a lieu, déterminé par l’ordre du tour. Quelques règles doivent être observées avant d’affronter un adversaire : la région de l’attaquant doit être adjacente à celle du défenseur et le nombre de clans présents dans la région de l’attaquant doit être strictement supérieur au nombre de clans présents dans la région du défenseur. Si toutes ces conditions sont remplies, l’attaquant choisit le nombre de clans que le défenseur doit perdre et en perd lui-même le même nombre. Cette règle d’affrontement ne laisse donc aucune place au hasard et s’appuie davantage sur l’intimidation que l’agression pure, une idée particulièrement brillante, qui laisse parfois la place aux victoires pacifiques. Même s’il est toujours possible de se faire surprendre par une carte d’attaque ou de défense non vue en phase de draft, une défaite imprévue est plus souvent le résultat d’un manque d’anticipation de votre part que d’un coup du sort. Les tours d’assaut s’enchaînent ainsi jusqu’à ce que tous les joueurs décident de faire la paix.
S’en suit alors l’étape de fin de l’âge, où les peuplades bâtissent leurs cités et procèdent au décompte intermédiaire en additionnant les points octroyés par leurs cartes Invention préalablement posées et leurs cartes Fin de l’âge (icône dorée). Le joueur s’étant le moins illustré pourra choisir l’ordre de son tour pour l’âge suivant, ce qui permet d’équilibrer l’ensemble. À la fin de la partie, il faut ajouter aux décomptes intermédiaires les points de rayonnement (deux points par région que vous occupez sur le continent adverse), les points de conquête (valeur inscrite sur les régions que vous occupez) et enfin les points de votre objectif secret pour obtenir votre score final et déterminer le vainqueur.
Un mot sur le mode solo
L’auteur a eu la bonne idée d’inclure un mode solo. Vous contrôlez alors deux clans neutres que vous devrez faire prospérer pour obtenir le meilleur score possible. Sachez toutefois que l’expérience est pour le moins tronquée : il n’y a ni phase de draft (les cartes sont distribuées au hasard aux deux peuplades en début d’âge), ni phase d’attaque (logique), ni objectif secret. Il permet malgré tout de se familiariser avec les cartes et de construire des ébauches de stratégie pour vos futures parties à plusieurs.
Qu’y a-t-il donc à reprocher à Genesia ? Sa thématique un peu trop légère ? Peut-être. Les illustrations de Fabrice Weiss et d’Alexei Iakovlev ont beau marquer les différentes époques traversées par les peuplades et symboliser leurs avancées technologiques, celles-ci ne se matérialisent pas sur le plateau, brisant ainsi l’immersion du joueur. Son allure un peu trop plastique ? Certainement. Même si l’on comprend le choix de ce matériau pour des raisons pratiques et budgétaires, force est de constater qu’il donne un aspect un peu trop “factice” au jeu. Qu’à cela ne tienne, Genesia ne brille pas sur la forme, mais sur le fond. En s’appuyant sur des mécaniques parfaitement huilées et en limitant la part de hasard dans les affrontements, le jeu met l’accent sur la stratégie et l’anticipation (les joueurs ont connaissance d’une partie des cartes qui ont été choisies par leurs adversaires pendant la phase de draft). Et si par malheur une certaine forme de lassitude venait à se faire sentir, il est toujours possible d’utiliser les autres lots de cartes inclus dans le jeu, pour apporter un peu plus de variété ou bien accentuer ou diminuer les interactions.
- Auteur : Éric Labouze
- Illustrateurs : Fabrice Weiss et Alexei Iakovlev
- Éditeurs : Super Meeple et Citizen Game
- Genre : Conquête
- Date de sortie : Février 2020
- Nombre de joueurs : 1 à 5
- Âge recommandé : À partir de 14 ans
- Durée de la partie : 20 mn par joueur
- Super Meeple et Citizen Game signent avec Genesia une bien belle réussite. Certes, le jeu n'est pas un exemple d'originalité et souffre quelque peu de sa thématique trop en retrait, mais il compense ses petites faiblesses en se concentrant sur des mécaniques qui ont fait leurs preuves et des idées judicieuses, livrant au final une expérience accessible, solide, durable et particulièrement convaincante. Gageons qu'il saura trouver sa place parmi une offre ludique toujours plus pléthorique !
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